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Si un brigand vient frapper à ma porte parce qu’il cherche un homme que j’ai caché chez moi quelques minutes auparavant, suis-je vraiment tenu de dire la vérité ? Pour Kant, je ne peux jamais justifier moralement mon action par ses conséquences, parce que celles-ci sont toujours incertaines.
On ne peut pas mettre en cause la vérité sous prétexte que tout pouvoir tend à faire passer pour vraies les croyances qui peuvent le renforcer.
L’Étranger, personnage principal du Sophiste, redoute d’être « devenu une sorte de parricide », c’est-à- dire d’avoir tué le père de la pensée, Parménide, qui soutenait que « seul l’être est, le non- être n’est pas ». Car qui veut comprendre le magicien, l’expert en illusion qu’est le sophiste, doit pouvoir penser la réalité du faux.
Dans le livre IV du De rerum natura (De la nature), Lucrèce, réfléchissant aux phénomènes trompeurs qui accompagnent souvent l’exercice des sens (reflets, illusions, mirages, échos, ombres, rêves, fantasmes), se demande s’il faut conclure à une tromperie irrémédiable des sens. « N’impute pas aux yeux les défauts de l’esprit », déclare le poète et disciple d’Épicure.
Le paragraphe 40 du dialogue intitulé "Le Maître" d’Augustin est consacré à l’enseignement de ces « choses que nous contemplons par l’esprit, c’est-à- dire par l’intellect et la raison ». La considération des choses intelligibles, à la différence des choses sensibles, est au fondement d’une critique de la prétendue puissance démonstrative des mots.
Pour réduire l’ignorance, il faut être certain que ce qui est ignoré est proportionné à ce qui est connu. Sinon, la connaissance ne saurait progresser. Mais comment acquérir une telle certitude ? Y parvenir reviendrait à surmonter une contradiction logique insurmontable, où l’on saurait déjà ce qui reste encore à savoir. Ainsi, c’est la possibilité d’un accès absolument exact à la vérité qui est remise en cause par Nicolas de Cues dans La Docte Ignorance.
Mersenne, correspondant de Descartes, lui avait envoyé l’ouvrage "De veritate" (« De la vérité »), d’Herbert de Cherbury. Le remerciant pour son envoi, Descartes lui répond que définir la vérité, c’est risquer d’en opacifier l’intelligence : l’évidence de la « lumière naturelle » qu’est notre raison doit suffire à en comprendre le sens.
Dans "De l’esprit géométrique et de l’art de persuader", Pascal cherche à définir la manière de prouver une vérité que l’on possède. Prenant la géométrie comme modèle, il affirme que la « véritable méthode » consisterait « à définir tous les termes et à prouver toutes les propositions ». Mais cet idéal semble être impossible à appliquer dans la pratique.
L’entendement, pour être apte à la connaissance de la plus haute perfection à laquelle l’homme doit parvenir, doit être réformé. Se pose alors un problème de méthode, l’entendement étant à la fois ce qui est à réformer et ce qui va déterminer les voies de la réforme. La recherche de la vérité n’est-elle pas compromise ?
Descartes soutient dans son œuvre qu’un critère fiable de la vérité d’une proposition est son évidence, c’est-à- dire sa clarté et sa distinction intrinsèques. Ainsi pourraient être justifiées des propositions fondamentales, sur lesquelles d’autres propositions, moins évidentes, pourraient ensuite être étayées. Leibniz discute cette conception.
Dans l’Enquête sur l’entendement humain, Hume soutient que les vérités qui concernent les faits ne peuvent ni être démontrées par le raisonnement ni s’appuyer sur une évidence intuitive ; elles reposent sur des associations d’idées opérées par l’imagination humaine, sous l’effet de l’habitude. Est- ce à dire que ces vérités se réduisent à des fictions sans consistance ?
Dans la quatrième promenade des Rêveries du promeneur solitaire, Rousseau se livre à un examen de conscience : lui qui avait pour devise de consacrer sa vie à la vérité (« vitam impendere vero ») reconnaît s’être souvent livré à des « inventions », à des mensonges « de gaieté de cœur, sans nécessité, sans profit ». Que devons-nous à la vérité ?
Les additions à l’Encyclopédie des sciences philosophiques sont issues des notes de cours des élèves de Hegel. S’y trouvent explicités, à des fins pédagogiques, des concepts centraux. Hegel propose une définition de la vérité qui ne subordonne pas la vérité d’une pensée à la réalité factuelle. La vérité serait alors l'accord d’un contenu avec lui?même.
Pour Tocqueville, la démocratie ne se réduit pas à un ensemble d’institutions politiques ; c’est avant tout un état social caractérisé par une égalité des conditions. Un tel état social exerce une influence sur les mœurs et les habitudes intellectuelles des individus, pouvant encourager l’exercice individuel de la raison. Est-ce à dire que les autorités sociales censées dire la vérité deviennent inutiles ?
Au lieu de se demander quels sont les critères de la vérité, Nietzsche s’interroge sur la « valeur de la vérité » pour la vie et sur l’origine de notre désir de connaissance. La perspective généalogique démasque alors, sous l’apparence d’une poursuite désintéressée de la vérité, une croyance qui dépasse le domaine restreint de la recherche scientifique.
Une tradition classique définit la vérité comme l’accord, ou l’adéquation, entre le réel et sa représentation. Cette définition a pu être discutée, voire récusée. James en accepte l’essentiel, mais en nuance le concept ; en effet, les modes d’acquisition de la vérité, c’est-à- dire le dynamisme de l’enquête, ne sont-ils pas cruciaux pour qui veut en saisir la notion ?