12 Hommes en Colère est un film de 1957 réalisé par Sidney Lumet. Il met en scène un jury composé de 12 hommes qui doivent décider du sort d'un jeune homme accusé de parricide. Au début, 11 jurés sont convaincus de sa culpabilité et votent pour une condamnation à la peine de mort. Seul un juré, interprété par Henri Fonda, émet des doutes et vote non coupable.
Le film présente alors les tensions au sein de ce jury, les préjugés, les émotions et les raisonnements de chacun. Petit à petit, le juré sceptique remet en cause les éléments à charge et soulève des zones d'ombres dans l'accusation, obligeant les autres à revoir leur jugement initial. Ce film montre bien à quel point une condamnation, même dans un système juridique censé être équitable, peut être initialement motivée par les préjugés, les émotions et une forme de désir de vengeance plutôt que par une analyse rationnelle et impartiale des faits.
Le film souligne ainsi les processus d'influence groupale et la difficulté pour certains jurés de remettre en cause leur jugement initial malgré l'apparition de nouveaux doutes raisonnables. On voit alors que la punition peut parfois découler d'une forme de conformisme de groupe plutôt que d'une véritable quête de justice.
La punition est-elle l'expression légitime de la justice, ou bien est-elle simplement la manifestation légale de la vengeance ?
Il faut alors réfléchir sur la nature de la punition dans le cadre juridique et son éventuelle assimilation à la vengeance, qui est un acte personnel et émotionnel. La punition, en tant que réponse institutionnelle à un délit, est censée suivre des principes de justice et de réparation, tandis que la vengeance est souvent motivée par des sentiments de colère et de rétribution personnelle.
Dans sa 'Généalogie de la morale', Nietzsche affirme que la punition n'a pas toujours été perçue comme un moyen de responsabiliser le coupable. Au contraire, dans les périodes les plus anciennes de l'histoire humaine, on punissait par pure colère et désir de vengeance face à un dommage subi. Ce n'est que plus tard que la punition a revêtu une dimension plus 'rationnelle', de compensation pour une dette. Mais même alors, ce lien entre 'faute' et 'souffrance' reste empreint d'une odeur de cruauté.
Pendant la plus longue période de l'histoire humaine, on n'a nullement puni parce qu'on tenait le malfaiteur pour responsable de son action [...] on punissait par colère, du fait qu'on avait subi un dommage, et l'on passait sa colère sur l'auteur du dommage
Nietzsche
Nietzsche
Ces généalogistes de la morale ont-ils jamais entrevu jusqu’ici, ne serait-ce que vaguement, que le concept de Schuld [faute] par exemple, concept fondamental de la morale, remonte à un concept très matériel de Schulden [dettes] ? Ou que le châtiment en tant que représailles s’est développé complètement à l’écart de toute hypothèse quant à la liberté ou à la non-liberté de la volonté ? – et cela au point qu’il faut au contraire que l’animal «homme» ait déjà atteint un haut degré d’humanisation pour commencer à faire des distinctions bien plus primitives, telles que «avec préméditation», «par imprudence», «accidentellement», «responsable» et les notions contraires, et en tenir compte dans la fixation de la peine.
«Le criminel mérite punition, parce qu’il aurait pu agir autrement», cette idée aujourd’hui si commune, si naturelle en apparence, si inévitable, et que l’on met sans cesse en avant pour expliquer comment est né le sentiment de la justice est en fait une forme tout à fait tardive et même raffinée du jugement et du raisonnement humain : qui la place dans les commencements se méprend grossièrement sur la psychologie de l’humanité primitive. Pendant la plus longue période de l’histoire humaine, on n’a nullement puni parce qu’on tenait le malfaiteur pour responsable de son action, donc pas du tout en supposant que seul le coupable doit être puni : – non, comme le font encore aujourd’hui les parents avec leurs enfants, on punissait par colère, du fait qu’on avait subi un dommage, et l’on passait sa colère sur l’auteur du dommage – mais cette colère se trouvait limitée et modifiée par l’idée que tout dommage trouve son équivalent d’une façon ou d’une autre et peut être réellement compensé, serait-ce par une douleur infligée à son auteur.
D’où a-t-elle tiré son pouvoir, cette immémoriale idée, profondément enracinée, aujourd’hui peut-être inextirpable, d’une équivalence entre dommage et douleur ? Je l’ai déjà dit : du rapport contractuel entre créancier et débiteur, rapport aussi ancien que l’existence des «personnes juridiques», et qui ramène à son tour aux formes fondamentales de l’achat, de la vente, de l’échange, du trafic.