• Russell
"la véritable sagesse au-delà  des dogmes religieux"
science - religion



Le contexte :

Bertrand russell explore la nature de la religion en tant qu'état d'esprit indépendant des croyances théologiques. il souligne que la religion peut persister malgré le déclin des dogmes, tant qu'elle inspire la quête de compréhension du monde et l'amélioration de la condition humaine, mettant ainsi en avant la nécessité de séparer la foi des croyances sans fondement pour atteindre la véritable sagesse.

Le repère :

croire/savoir

Le texte :

« Il existe un aspect de la vie religieuse, le plus précieux peut-être, qui est indépendant des découvertes de la science, et qui pourra survivre quelles que soient nos convictions futures au sujet de la nature de l'univers. La religion a été liée dans le passé, non seulement aux credos  et aux Eglises, mais à la vie personnelle de ceux qui ressentaient son importance. […] L'homme qui ressent profondément les problèmes de la destinée humaine, le désir de diminuer les souffrances de l'humanité, et l'espoir que l'avenir réalisera les meilleures possibilités de notre espèce, passe souvent aujourd'hui pour avoir �oeune tournure d'esprit religieuse”, même s'il n'admet qu'une faible partie du christianisme traditionnel. Dans la mesure où la religion consiste en un état d'esprit, et non en un ensemble de croyances, la science ne peut l'atteindre. Peut-être le déclin des dogmes rend-il temporairement plus difficile l'existence d'un tel état d'esprit, tant celui-ci a été intimement lié jusqu'ici aux croyances théologiques. Mais il n'y a aucune raison pour que cette difficulté soit éternelle : en fait, bien des libres penseurs ont montré par leur vie que cet état d'esprit n'est pas forcément lié à un credo . Aucun mérite réel ne peut être indissolublement lié à des croyances sans fondement ; et, si les croyances théologiques sont sans fondement, elles ne peuvent être nécessaires à la conservation de ce qu'il y a de bon dans l'état d'esprit religieux. Être d'un autre avis, c'est être rempli de craintes au sujet de ce que nous pouvons découvrir, craintes qui gêneront nos tentatives pour comprendre le monde ; or, c'est seulement dans la mesure o ù nous parvenons à le comprendre que la véritable sagesse devient possible. »
Russell, Science et religion

Les questions :



[A] û Questions dÆanalyse
1) Quel est l'aspect de la vie religieuse qui est indépendant des découvertes de la science ?
2) Qu'est-ce que la religion a été liée dans le passé, en plus des credos et des Eglises ?
3) Comment peut-on définir la religion selon l'auteur ?
4) Quelle est la difficulté temporaire liée au déclin des dogmes religieux ?

[B] û Eléments de synth��se
1) Expliquez la phrase : "Dans la mesure o�� la religion consiste en un état d'esprit, et non en un ensemble de croyances, la science ne peut l'atteindre."
2) En vous aidant des éléments précédents, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.

[C] û Commentaire
1) Selon l'auteur, pourquoi les croyances théologiques ne sont pas nécessaires à la conservation de l'état d'esprit religieux ?
2) A la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si la science et la religion sont incompatibles.

L'analyse :

Voici une possible analyse du texte de russell : russell aborde le thème du rapport entre la science et la religion, et cherche à montrer qu'il existe un aspect de la vie religieuse qui peut être préservé malgré les progrès de la science.

Il s'agit de l'état d'esprit religieux, qui se caractérise par une sensibilité aux problèmes de la destinée humaine, un désir de diminuer les souffrances, et un espoir en l'avenir.

Russell distingue cet état d'esprit des credos et des dogmes, qui sont des croyances théologiques sans fondement, et qui ne sont pas nécessaires pour avoir une tournure d'esprit religieuse.

Il affirme que la science ne peut pas atteindre l'état d'esprit religieux, mais qu'elle peut remettre en cause les croyances théologiques.

Il soutient que le déclin des dogmes n'est pas une menace pour la valeur morale de la religion, mais au contraire une opportunité pour la véritable sagesse, qui repose sur la compréhension du monde.

Pour développer son argumentation, russell utilise plusieurs procédés :

- il commence par une affirmation générale qui annonce sa thèse : "il existe un aspect de la vie religieuse, le plus précieux peut-être, qui est indépendant des découvertes de la science".

Il s'agit d'une concession qui reconnaît que la science peut avoir un impact sur certains aspects de la religion, mais pas sur le plus important selon lui.



- il illustre ensuite sa thèse par un exemple concret : "l'homme qui ressent profondément les problèmes de la destinée humaine [.

] passe souvent aujourd'hui pour avoir ôune tournure d'esprit religieuseö, même s'il n'admet qu'une faible partie du christianisme traditionnel".

Il s'agit d'un argument d'autorité qui s'appuie sur l'opinion commune pour définir ce qu'est l'état d'esprit religieux.



- il oppose ensuite l'état d'esprit religieux à l'ensemble des croyances, en utilisant des termes contrastés : "dans la mesure où la religion consiste en un état d'esprit, et non en un ensemble de croyances".

Il s'agit d'une distinction conceptuelle qui vise à clarifier le sens des termes employés.



- il reconnaît ensuite une difficulté possible pour sa thèse : "peut-être le déclin des dogmes rend-il temporairement plus difficile l'existence d'un tel état d'esprit".

Il s'agit d'une objection qui admet que la science peut avoir un effet négatif sur la religion, mais seulement de façon provisoire.



- il réfute ensuite cette objection en donnant un contre-exemple : "mais il n'y a aucune raison pour que cette difficulté soit éternelle : en fait, bien des libres penseurs ont montré par leur vie que cet état d'esprit n'est pas forcément lié à un credo".

Il s'agit d'un argument historique qui s'appuie sur des faits avérés pour montrer que l'état d'esprit religieux peut exister sans croyance théologique.



- il conclut ensuite par une affirmation normative qui exprime sa position morale : "aucun mérite réel ne peut être indissolublement lié à des croyances sans fondement".

Il s'agit d'un jugement de valeur qui évalue les croyances théologiques comme étant inférieures à l'état d'esprit religieux.



- il termine enfin par une ouverture qui invite à poursuivre la réflexion : "être d'un autre avis, c'est être rempli de craintes au sujet de ce que nous pouvons découvrir [.

] or, c'est seulement dans la mesure où nous parvenons à le comprendre que la véritable sagesse devient possible".

Il s'agit d'une implication qui montre les conséquences pratiques et philosophiques de sa thèse, et qui valorise la science comme source de sagesse.