Montesquieu explore la question de la gouvernance démocratique et la nécessité de la représentation politique. il soutient que dans les grands états, la puissance législative doit être exercée par des représentants élus par le peuple, permettant ainsi une meilleure gestion des affaires publiques et évitant les défauts de la démocratie directe.
légal/légitime
« Comme, dans un État libre, tout homme qui est censé avoir une âme libre doit être gouverné par lui-même, il faudrait que le peuple en corps eût la puissance législative. Mais comme cela est impossible dans les grands États, et est sujet à beaucoup d'inconvénients dans les petits, il faut que le peuple fasse par ses représentants tout ce qu'il ne peut faire par lui-même. L'on connaît beaucoup mieux les besoins de sa ville que ceux des autres villes ; et on juge mieux de la capacité de ses voisins que de celle de ses autres compatriotes. Il ne faut donc pas que les membres du corps législatif soient tirés en général du corps de la nation ; mais il convient que, dans chaque lieu principal, les habitants se choisissent un représentant. Le grand avantage des représentants, c'est qu'ils sont capables de discuter les affaires. Le peuple n'y est point du tout propre ; ce qui forme un des grands inconvénients de la démocratie. »
Montesquieu, De l'Esprit des lois
[A] - Questions d'analyse :
1) Quel est le lien entre le fait que tout homme dans un État libre doit être gouverné par lui-même et le besoin pour le peuple d'avoir la puissance législative ?
2) Quels sont les inconvénients de donner la puissance législative au peuple en corps dans les grands États ?
3) Pourquoi est-il préférable que le peuple fasse par ses représentants tout ce qu'il ne peut faire par lui-même ?
4) Quels sont les avantages des représentants par rapport au peuple lorsqu'il s'agit de discuter les affaires ?
[B] - Éléments de synth��se :
Voici une possible analyse du texte de montesquieu :
- le texte commence par poser le principe de la souveraineté populaire dans un état libre, selon lequel tout homme doit être gouverné par lui-même.
L'auteur affirme donc que le peuple doit avoir la puissance législative, c'est-à-dire le pouvoir de faire les lois qui régissent la société.
Il s'agit d'une idée qui s'inscrit dans le courant du contrat social, qui considère que les hommes ont renoncé à leur liberté naturelle pour se donner des lois communes.
- cependant, l'auteur reconnaît que ce principe est impossible à réaliser dans les grands états, où le peuple est trop nombreux et dispersé pour se réunir et délibérer.
Il admet aussi qu'il y a des inconvénients à la démocratie directe dans les petits états, où le peuple peut être influencé par les passions, les préjugés ou les intérêts particuliers.
Il faut donc que le peuple délègue son pouvoir à des représentants, qui sont élus par les citoyens pour les représenter.
L'auteur introduit ainsi la notion de démocratie représentative, qui est un compromis entre la démocratie et l'aristocratie.
- l'auteur précise ensuite les conditions de la représentation.
Il faut que les représentants soient choisis par les habitants de chaque lieu principal, c'est-à-dire par des circonscriptions territoriales.
Il faut aussi que les représentants soient capables de discuter les affaires, c'est-à-dire de débattre rationnellement et de prendre des décisions éclairées.
L'auteur oppose ainsi la capacité des représentants à l'incapacité du peuple, qui n'est pas propre à discuter les affaires.
Il souligne donc le rôle éducatif et modérateur des représentants, qui doivent faire prévaloir l'intérêt général sur les intérêts particuliers.
Le texte de montesquieu présente donc sa conception de la démocratie représentative, qui est un régime politique adapté aux grands états et qui permet de concilier la souveraineté populaire et la rationalité législative.
Il s'agit d'une idée novatrice pour son époque, qui influencera les révolutions américaine et française.