• Cicéron
La primauté de la nature dans la création du droit
justice - nature



Le contexte :

Dans ce passage de "des lois", cicéron remet en question la légitimité du droit créé par les décisions et les opinions des individus. il souligne l'importance de la nature comme critàùre pour distinguer le bien du mal, le juste de l'injuste, et remet en cause l'idée que ces distinctions ne seraient que des conventions.

L' auteur :

Cicéron

Le repère :

légal/légitime

Le texte :

« Si la volonté des peuples, les décrets des chefs, les sentences des juges faisaient le droit, pour créer le droit au brigandage, à l'adultère, à la falsification des testaments, il suffirait que ces façons d'agir eussent le suffrage et l'approbation de la multitude. Si les opinions et les votes des insensés ont une puissance telle qu'ils puissent changer la nature des choses, pourquoi ne décideraient-ils pas que ce qui est mauvais et pernicieux sera désormais tenu pour bon et salutaire ? Ou pourquoi la loi qui de l'injuste peut faire le droit, ne convertirait-elle pas le bien en mal ? C'est que, pour distinguer une bonne loi d'une mauvaise, nous n'avons d'autre règle que la nature. Et non seulement la nature nous fait distinguer le droit de l'injustice, mais, d'une manière générale, les choses moralement belles de celles qui sont laides ; car une sorte d'intelligence partout répandue nous les fait connaître, et incline nos âmes à identifier les premières aux vertus, les secondes aux vices. Or croire que ces distinctions sont de pure convention et non fondées en nature, c'est de la folie. »
Cicéron, Des Lois

Les questions :



[A] û Questions dÆanalyse
1) Pourquoi selon Cicéron, la volonté des peuples, les décrets des chefs et les sentences des juges ne peuvent-ils pas faire le droit ?
2) Que veut dire Cicéron en affirmant que « pour distinguer une bonne loi d'une mauvaise, nous n'avons d'autre r��gle que la nature ? ?
3) Comment l'auteur justifie-t-il que les distinctions entre le bien et le mal, le droit et l'injustice sont fondées en nature ?
4) En quoi la nature nous aide-t-elle à identifier les choses moralement belles et laides ?

[B] û Eléments de synth��se
1) Expliquez la phrase : « C'est que, pour distinguer une bonne loi d'une mauvaise, nous n'avons d'autre r��gle que la nature. ?

L'analyse :

Voici un exemple de commentaire linéaire du texte de cicéron : dans ce texte, cicéron défend l'idée que le droit et la morale sont fondés sur la nature et non sur la convention humaine.

Il s'oppose ainsi à la thèse du sophiste thrasymaque, qui affirme dans la république de platon que le droit est le produit de la volonté du plus fort.

Pour soutenir sa thèse, cicéron utilise trois arguments principaux :

- le premier argument est un argument par l'absurde.

Cicéron imagine que si le droit dépendait de la volonté des peuples, des chefs ou des juges, alors il suffirait qu'ils approuvent des actions manifestement injustes, comme le brigandage, l'adultère ou la falsification des testaments, pour les rendre légitimes.

Il montre ainsi que cette hypothèse conduit à une contradiction, puisque ces actions sont contraires à la notion même de droit, qui implique le respect de la propriété, de la fidélité et de la volonté des morts.

Il souligne aussi le caractère arbitraire et changeant de la volonté humaine, qui ne peut pas être un fondement stable et universel du droit.



- le deuxième argument est un argument par analogie.

Cicéron compare la situation où les opinions et les votes des insensés pourraient changer la nature des choses à celle où ils pourraient changer la valeur morale des actions.

Il suggère que si l'on admet que les insensés ne peuvent pas modifier la réalité par leur jugement, alors on doit aussi admettre qu'ils ne peuvent pas modifier le bien et le mal par leur décision.

Il fait ainsi appel au bon sens et à l'évidence pour réfuter l'idée que le droit et la morale sont relatifs aux circonstances ou aux préférences des hommes.



- le troisième argument est un argument par autorité.

Cicéron affirme que la nature est la seule règle qui nous permette de distinguer une bonne loi d'une mauvaise, et plus généralement les choses moralement belles des choses moralement laides.

Il invoque une sorte d'intelligence partout répandue qui nous fait connaître ces distinctions et qui incline nos âmes à identifier les premières aux vertus, les secondes aux vices.

Il s'appuie ainsi sur une conception sto´cienne de la nature, qui est ordonnée par une raison divine et qui imprime en nous une loi naturelle conforme à cette raison.

Il conclut que nier cette conception est de la folie, c'est-à-dire une aberration intellectuelle et morale.

A travers ces arguments, cicéron vise à établir que le droit et la morale sont des réalités objectives et universelles, qui découlent de la nature et non de la convention.

Il cherche ainsi à fonder une éthique et une politique rationnelles, qui respectent l'ordre naturel et favorisent le bien commun.

Il s'inscrit dans une tradition philosophique qui remonte à socrate et platon, et qui s'oppose au relativisme et au scepticisme des sophistes.