• Rousseau
Le bonheur et la vertu : une relation complexe
bonheur - devoir



Le contexte :

Dans cette lettre, rousseau soulàùve la question du lien entre le bonheur et la vertu. il affirme que faire le bien pour soi-même est essentiel pour être réellement heureux, tandis que les méchants sont condamnés à  la misàùre. cependant, il précise que la vertu ne garantit pas le bonheur immédiat, mais permet de mieux apprécier les plaisirs et de faire face aux difficultés de la vie.

L' auteur :

Rousseau

(1712-1778) Repense les structures de la société et de l'éducation à son époque. Son effort philosophique vise à unifier sous une même pensée la relation qu'ont les hommes entre eux dans la société, l'effet de la société moderne sur ces derniers, et la source de cette relation.

Le repère :

essentiel/accidentel

Le texte :

« Il ne faut point confondre le bonheur avec la vertu. Il est certain que faire le bien pour le bien, c'est le faire pour soi, pour notre propre intérêt, puisqu'il donne à l'âme une satisfaction intérieure, un contentement d'elle-même sans lequel il n'y a point de vrai bonheur. Il est sûr encore que les méchants sont tous misérables, quel que soit leur sort apparent, parce que le bonheur s'empoisonne dans une âme corrompue, comme le plaisir des sens dans un corps malsain. Mais il est faux que les bons soient tous heureux dès ce monde, et comme il ne suffit pas au corps d'être en santé pour avoir de quoi se nourrir, il ne suffit pas non plus à l'âme d'être saine pour obtenir tous les biens dont elle a besoin. Quoiqu'il n'y ait que les gens de bien qui puissent vivre contents, ce n'est pas à dire que tout homme de bien vive content. La vertu ne donne pas le bonheur, mais elle seule apprend à en jouir quand on l'a : la vertu ne garantit pas des maux de cette vie et n'en procure pas les biens ; c'est ce que ne fait pas non plus le vice avec toutes ses ruses ; mais la vertu fait porter plus patiemment les uns et goûter plus délicieusement les autres. Nous avons donc, en tout état de cause, un véritable intérêt à la cultiver, et nous faisons bien de travailler pour cet intérêt, quoiqu'il y ait des cas où il serait insuffisant par lui-même, sans l'attente d'une vie à venir. »
Rousseau, Lettre à M. d'Offreville (1761)

Les questions :



[A] - Questions d'analyse
1) Quelle est la différence entre le bonheur et la vertu selon l'auteur ?
2) Qu'est-ce que l'auteur veut dire par "faire le bien pour le bien" ?
3) Comment peut-on expliquer le lien entre la satisfaction intérieure de l'âme et le vrai bonheur ?
4) Quelle est la relation entre la corruption de l'âme et le bonheur selon l'auteur ?

[B] - Éléments de synth��se
1) Expliquez le sens de la phrase : "La vertu ne donne pas le bonheur, mais elle seule apprend à en jouir quand on l'a."
2) En vous basant sur les éléments précédents, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.

[C] - Commentaire
1) Selon vous, est-il possible d'être véritablement heureux sans être vertueux ? Justifiez votre réponse.
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si la vertu est une condition nécessaire au bonheur dans cette vie.

L'analyse :

Voici un exemple de commentaire linéaire du texte de rousseau : dans ce texte, rousseau s'interroge sur le rapport entre la vertu et le bonheur, deux notions qui sont souvent confondues ou assimilées.

Il cherche à montrer que la vertu n'est pas une condition suffisante du bonheur, mais qu'elle est néanmoins nécessaire pour en jouir pleinement.

Il distingue ainsi trois idées principales dans son argumentation :

- la première idée est que la vertu procure un contentement intérieur, qui est la source du vrai bonheur.

Rousseau affirme que "faire le bien pour le bien, c'est le faire pour soi, pour notre propre intérêt", car cela donne à l'âme une "satisfaction intérieure", un "contentement d'elle-même" qui est indispensable au bonheur.

Il oppose cette idée à celle des méchants, qui sont "tous misérables", quel que soit leur sort apparent, car ils ne peuvent pas éprouver ce contentement intérieur.

Le bonheur, selon rousseau, n'est pas une affaire de circonstances extérieures, mais de disposition intérieure.

Il s'agit donc d'un bonheur moral, qui dépend de la conformité de nos actions à notre conscience.



- la deuxième idée est que la vertu n'assure pas le bonheur terrestre, car il dépend aussi de biens extérieurs qui ne sont pas garantis par la vertu.

Rousseau reconnaît que la vertu ne suffit pas au bonheur, car il faut aussi avoir "de quoi se nourrir" et "tous les biens dont [l'âme] a besoin".

Il admet donc qu'il existe des biens matériels et sensibles qui contribuent au bonheur, mais qui ne sont pas le résultat de la vertu.

Il y a donc une part de hasard et d'injustice dans le bonheur terrestre, qui peut être accordé ou refusé indépendamment de la vertu.

Rousseau illustre cette idée en disant que "ce n'est pas à dire que tout homme de bien vive content".

Il y a donc des hommes vertueux qui sont malheureux sur terre, et des hommes vicieux qui semblent heureux.



- la troisième idée est que la vertu permet de mieux supporter les maux et de mieux savourer les biens de cette vie.

Rousseau nuance son propos en affirmant que la vertu n'est pas sans effet sur le bonheur terrestre, mais qu'elle agit plutôt sur la manière dont on le ressent.

Il dit que "la vertu ne donne pas le bonheur, mais elle seule apprend à en jouir quand on l'a".

Il s'agit donc d'une capacité à apprécier les biens dont on dispose, sans les prendre pour acquis ni les gaspiller.

De même, il dit que "la vertu fait porter plus patiemment les [maux] et go¹ter plus délicieusement les [biens]".

Il s'agit donc d'une force morale qui permet de résister aux épreuves et de profiter des plaisirs sans se corrompre.

La vertu modère ainsi les passions et les désirs, qui sont souvent sources de souffrance ou d'insatisfaction.

En conclusion, rousseau défend une conception du bonheur qui repose sur la vertu, mais qui ne s'y réduit pas.

Il montre que la vertu est nécessaire pour atteindre le vrai bonheur, qui est un état d'harmonie avec soi-même et avec sa conscience.

Mais il reconnaît aussi que la vertu n'est pas suffisante pour assurer le bonheur terrestre, qui dépend aussi de facteurs extérieurs et aléatoires.

Il affirme néanmoins que la vertu permet de mieux vivre sur terre, en rendant plus supportables les maux et plus agréables les biens.

Il conclut en disant que nous avons un intérêt à cultiver la vertu, même si elle ne nous garantit pas le bonheur ici-bas, car elle nous prépare à une vie future où nous serons récompensés ou punis selon nos actions.