• Sartre
La malédiction de la maladie et le choix d'attitudes
-



Le contexte :

Dans ce texte, sartre aborde la question de la maladie et de ses conséquences sur les possibilités de vie d'un individu. il souligne que bien que les possibilités puissent être limitées par la maladie, il reste toujours le choix d'adopter différentes attitudes face à  cette situation, ce qui implique un dépassement de soi.

L' auteur :

Sartre

(1905-1980) Philosophe existentialiste français majeur du 20e siècle, Sartre a exploré la notion de la liberté, de la responsabilité individuelle et de l'absurdité de l'existence humaine. Il a développé des idées sur l'existentialisme, la mauvaise foi et l'authenticité.

Le repère :

impossible/possible

Le texte :

« Me voila? tuberculeux, par exemple. Ici apparai?t la male?diction (et la grandeur). Cette maladie, qui m’infecte, m’affaiblit, me change, limite brusquement mes possibilite?s et mes horizons. J’e?tais acteur ou sportif ; avec mes deux pneumos , je ne puis plus l’e?tre. Ainsi ne?gativement, je suis de?charge? de toute responsabilite? touchant ces possibilite?s que le cours du monde vient de m’o?ter. C’est ce que le langage populaire nomme e?tre diminue?. Et ce mot semble recouvrir une image correcte : j’e?tais un bouquet de possibilite?s, on o?te quelques fleurs, le bouquet reste dans le vase, diminue?, re?duit a? quelques e?le?ments. Mais en re?alite? il n’en est rien : cette image est me?canique. La situation nouvelle, quoique venue du dehors, doit e?tre ve?cue, c’est-a?-dire assume?e, dans un de?passement. Il est vrai de dire qu’on m’o?te ces possibilite?s, mais il est aussi vrai de dire que j’y renonce ou que je m’y cramponne ou que je ne veux pas voir qu’elles me sont o?te?es ou que je me soumets a? un re?gime syste?matique pour les reconque?rir. En un mot, ces possibilite?s sont, non pas supprime?es, mais remplace?es par un choix d’attitudes possibles envers la disparition de ces possibilite?s. »
Sartre, Cahiers pour une morale (1947-1948)

L'analyse :

Dans ce texte, sartre réfléchit sur la situation d'un homme qui devient tuberculeux et qui perd certaines de ses possibilités d'existence.

Il s'interroge sur la façon dont cet homme peut assumer sa condition et sur le sens de sa liberté.



- dans un premier temps, sartre expose le cas du tuberculeux comme un exemple de "malédiction (et de grandeur)".

Il montre que la maladie, qui est un événement extérieur, vient modifier profondément la vie de l'homme, en lui enlevant des capacités et des projets.

Il utilise le vocabulaire de la négation ("m'infecte, m'affaiblit, me change, limite, m'ôter") pour souligner le caractère subi et douloureux de cette situation.

Il dit que l'homme est "déchargé" de toute responsabilité concernant ces possibilités perdues, ce qui implique qu'il n'a plus à se soucier de les réaliser ou de les regretter.

Il emploie l'expression "être diminué" pour rendre compte du sentiment commun que l'on a face à une telle épreuve : celui de perdre une partie de soi-même, de se réduire à un état inférieur.

Il illustre cette idée par une image : celle du bouquet de fleurs dont on enlève quelques-unes, et qui reste dans le vase, plus petit et moins beau.



- dans un deuxième temps, sartre critique cette image et cette conception de la situation du tuberculeux.

Il affirme qu'elles sont "mécaniques", c'est-à-dire qu'elles ne rendent pas compte de la dimension humaine et existentielle du problème.

Il explique que la situation nouvelle, même si elle est imposée par le monde, doit être "vécue", c'est-à-dire "assumée", dans un "dépassement".

Il s'agit pour l'homme de ne pas se résigner à sa condition, mais de la transformer en un choix personnel et conscient.

Il reconnaît que les possibilités perdues sont bien réelles, mais il ajoute qu'elles sont "remplacées" par d'autres possibilités : celles des "attitudes" que l'homme peut adopter face à leur disparition.

Il énumère quelques exemples de ces attitudes : renoncer, se cramponner, ne pas voir, se soumettre, reconquérir.

Il souligne ainsi que l'homme n'est pas passif ni déterminé par sa maladie, mais qu'il reste libre et responsable de sa façon d'être.



- dans un troisième temps, sartre tire les conséquences philosophiques de son analyse.

Il montre que la situation du tuberculeux illustre la condition humaine en général : celle d'un être qui est jeté dans un monde qui lui impose des contraintes et des limites, mais qui doit les affronter avec sa liberté et sa conscience.

Il suggère que la maladie n'est pas seulement une épreuve négative, mais aussi une occasion de révéler sa "grandeur" : celle d'un être capable de se dépasser et de donner un sens à son existence.

Il invite ainsi le lecteur à réfléchir sur sa propre situation et sur les choix qu'il.