• Locke
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L' auteur :

Locke

(1632-1704) Philosophe du mouvement de l'empirisme anglais, qui stipule que toute connaissance dérive par nature de l'expérience. Toute sa philosophie fait découler des implications pratiques à partir de ce constat.

Le repère :

origine/fondement

Le texte :

« On ne peut, a? mon sens, proposer une re?gle morale sans reconnai?tre a? chacun le droit d’en demander la raison, ce qui serait parfaitement ridicule et absurde si ces principes �taient inne?s, ou au moins e?vidents ; tout principe inne? doit en effet e?tre ne?cessairement e?vident, il ne doit exiger aucune preuve pour authentifier sa ve?rite?, ni avoir besoin d’un motif pour emporter la conviction. Qui demanderait ou chercherait des raisons pour lesquelles Il est impossible pour la me?me chose d’e?tre et de ne pas e?tre serait de?nue? de bon sens, pense-t-on ; ce principe porte en lui sa propre lumie?re, sa propre e?vidence et n’a besoin d’aucune autre preuve : en comprendre les termes c’est l’accepter pour lui-me?me, et rien d’autre ne pourra jamais le convaincre de le faire. Si, en revanche, quelqu’un n’ayant jamais entendu auparavant la re?gle la moins conteste?e de la morale, le fondement de toute vertu sociale, dont il peut comprendre pourtant le sens : Fais a? autrui ce que tu voudrais qu’on te fasse, ne pourrait-il pas sans absurdite? en demander la raison ? Et celui qui la propose ne serait-il pas oblige? de lui en montrer la ve?rite? et la sagesse ? Et ceci manifeste que ce principe n’est pas inne? ; car s’il l’e?tait, il n’aurait pas besoin de preuve, on ne pourrait lui en donner et on devrait au contraire le reconnai?tre et lui donner son assentiment (au moins de?s qu’on l’entend et le comprend), comme une ve?rite? assure?e et absolument indubitable. Ainsi, la ve?rite? de toutes ces re?gles morales de?pend d’une autre ve?rite? ante?rieure dont on doit la de?duire, ce qui ne pourrait se produire, si ces principes �taient inne?s ou seulement e?vidents. »
Locke, Essai sur l’entendement humain (1689)

Les questions :



[A] - Questions d'analyse
1) Pourquoi est-il absurde de proposer une r��gle morale sans en donner la raison ?
2) Comment peut-on reconnaître un principe inné ?
3) Pourquoi est-il possible de demander la raison d'une r��gle morale, contrairement à un principe inné ?
4) En quoi la vérité des r��gles morales dépend-elle d'une vérité antérieure ?

[B] - Éléments de synth��se
1) Expliquez la phrase : "La vérité de toutes ces r��gles morales dépend d'une autre vérité antérieure dont on doit la déduire."
2) En vous aidant des éléments précédents, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.

[C] - Commentaire
1) Selon vous, est-il possible de trouver une r��gle morale qui ne dépende pas d'une autre vérité antérieure ? Justifiez votre réponse.
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si l'existence de principes innés est compatible avec la raison et la liberté humaines.

L'analyse :

Voici un possible développement de l'analyse du texte : le texte de locke est un extrait de son essai sur l'entendement humain, où il s'oppose à la thèse des idées innées, c'est-à-dire des principes évidents et universels que l'esprit humain posséderait dès sa naissance.

Locke cherche à montrer que les règles morales ne sont pas de cette nature, mais qu'elles sont le résultat d'un raisonnement et d'une expérience.

Dans un premier temps, il expose sa méthode : il affirme qu'on ne peut proposer une règle morale sans reconnaître à chacun le droit d'en demander la raison.

Il s'agit donc d'une démarche critique et rationnelle, qui ne se contente pas d'imposer des principes sans justification.

Il en déduit que ce serait ridicule et absurde de prétendre que ces principes sont innés ou évidents, car cela reviendrait à les soustraire à toute discussion et à toute preuve.

Il pose ainsi le critère de l'évidence comme le signe distinctif des idées innées : si une idée est innée, elle doit être nécessairement évidente, c'est-à-dire qu'elle doit s'imposer à l'esprit sans effort ni doute.

Dans un deuxième temps, il illustre sa méthode par un exemple : il compare le principe de non-contradiction, qui est selon lui une idée innée et évidente, avec la règle d'or, qui est selon lui une règle morale qui n'est ni innée ni évidente.

Il montre que le principe de non-contradiction ne nécessite aucune preuve ni aucun motif pour être accepté : il suffit de comprendre les termes pour y adhérer.

En revanche, la règle d'or, qui consiste à faire à autrui ce qu'on voudrait qu'on nous fasse, peut être contestée ou ignorée par quelqu'un qui n'en voit pas la raison ou la sagesse.

Il faut donc lui en montrer la vérité et la valeur, ce qui implique que cette règle n'est pas innée, mais qu'elle dépend d'une autre vérité antérieure dont on doit la déduire.

Dans un troisième temps, il tire la conclusion de son analyse : il affirme que la vérité de toutes les règles morales repose sur une autre vérité antérieure dont on doit la déduire.

Il suggère ainsi que la morale n'est pas fondée sur des principes innés ou évidents, mais sur des principes rationnels ou empiriques, qui peuvent être découverts par l'entendement humain.

Il remet ainsi en cause l'idée d'une morale universelle et intemporelle, au profit d'une morale relative et historique.