• Aristote
La responsabilité de l'existence morale
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L' auteur :

Aristote

(-384--322) Est un des premiers philosophes à considérer scientifiquement et rationnellement le monde. Il a formalisé la logique et le calcul logique, il est à l'origine de la tendance scientifique à classer le monde en catégories.

Le repère :

essentiel/accidentel

Le texte :

« En menant une existence rela?che?e, les hommes sont personnellement responsables d’e?tre devenus eux-me?mes rela?che?s, ou d’e?tre devenus injustes ou intempe?rants , dans le premier cas par leur mauvaise conduite et dans le second en passant leur vie a? boire ou a? commettre des exce?s analogues : en effet, c’est par l’exercice des actions particulie?res qu’ils acquie?rent un caracte?re du me?me genre qu’elles. On peut s’en rendre compte en observant ceux qui s’entrai?nent en vue d’une compe?tition ou d’une activite? quelconque : tout leur temps se passe en exercices. Aussi, se refuser a? reconnai?tre que c’est a? l’exercice de telles actions particulie?res que sont dues les dispositions de notre caracte?re est le fait d’un esprit singulie?rement e?troit. En outre, il est absurde de supposer que l’homme qui commet des actes d’injustice ou d’intempe?rance ne veuille pas e?tre injuste ou intempe?rant ; et si, sans avoir l’ignorance pour excuse, on accomplit des actions qui auront pour conse?quence de rendre injuste, c’est volontairement qu’on sera injuste. Il ne s’ensuit pas cependant qu’un simple souhait suffira pour cesser d’e?tre injuste et pour e?tre juste, pas plus que ce n’est ainsi que le malade peut recouvrer la sante?, quoiqu’il puisse arriver qu’il soit malade volontairement en menant une vie intempe?rante et en de?sobe?issant a? ses me?decins : c’est au de?but qu’il lui �tait alors possible de ne pas e?tre malade, mais une fois qu’il s’est laisse? aller, cela ne lui est plus possible, de me?me que si vous avez la?che? une pierre vous n’e?tes plus capable de la rattraper, mais pourtant il de?pendait de vous de la jeter et de la lancer, car le principe de votre acte �tait en vous. Ainsi en est-il pour l’homme injuste ou intempe?rant : au de?but il leur �tait possible de ne pas devenir tels, et c’est ce qui fait qu’ils le sont volontairement ; et maintenant qu’ils le sont devenus, il ne leur est plus possible de ne pas l’e?tre. »
Aristote, E?thique a? Nicomaque (IVe sie?cle av. J.C.)

Les questions :



[a] û questions dÆanalyse
1) Comment les hommes deviennent-ils "relâchés" ou "injustes" selon Aristote ?
2) Quels comportements sont cités comme exemples de relâchement ou d'injustice ?
3) Pourquoi est-il absurde de penser que quelqu'un qui commet des actes d'injustice ou d'intempérance ne souhaite pas être injuste ou intempérant ?
4) Quelle comparaison est utilisée par Aristote pour illustrer le fait qu'une fois que quelqu'un est devenu injuste ou intempérant, il ne peut plus revenir en arri��re ?

[b] û éléments de synth��se
1) Expliquez le lien entre les actions particuli��res et le caract��re d'une personne selon Aristote.
2) En vous basant sur les éléments précédents, quel est le concept principal développé dans le texte et quelles sont les étapes de l'argumentation d'Aristote ?

[c] û commentaire
1) Selon vous, pourquoi est-il important de reconnaître que les actions particuli��res façonnent notre caract��re ?
2) À la lumi��re de vos connaissances et lectures, et en tenant compte du texte, expliquez si vous êtes d'accord avec l'idée d'Aristote selon laquelle une fois qu'une personne est devenue injuste ou intempérante, elle ne peut plus changer.

L'analyse :

Voici un possible développement de l'analyse du texte : le texte d'aristote traite de la question du caractère moral des hommes et de la responsabilité de leurs actions.

L'auteur cherche à montrer que les hommes deviennent vertueux ou vicieux selon les actes qu'ils accomplissent volontairement, et qu'ils ne peuvent pas changer facilement de caractère une fois qu'ils l'ont acquis.

Dans un premier temps, aristote affirme que les hommes sont personnellement responsables de leur caractère, qu'il soit relâché, injuste ou intempérant.

Il explique que c'est par l'exercice répété des actions particulières qu'ils acquièrent un caractère du même genre qu'elles.

Il prend l'exemple des athlètes qui s'entraînent pour une compétition, et qui développent ainsi des qualités physiques et mentales.

Il en déduit que nier le lien entre les actions et le caractère est le fait d'un esprit étroit.

Le moyen utilisé par aristote pour établir cette thèse est la comparaison entre les domaines moral et sportif, qui permet de mettre en évidence le rôle de l'habitude et de la pratique dans la formation du caractère.

L'enjeu de cette thèse est de souligner la responsabilité des hommes dans leur conduite morale, et de les inciter à choisir les actions qui les rendront vertueux.

Dans un second temps, aristote examine l'objection selon laquelle les hommes ne voudraient pas être injustes ou intempérants, et que leurs actions seraient donc involontaires.

Il réfute cette objection en affirmant que si les hommes accomplissent des actions qui auront pour conséquence de les rendre injustes ou intempérants, c'est qu'ils le veulent bien, sauf s'ils sont ignorants.

Il illustre son propos par l'exemple du malade qui a négligé sa santé en menant une vie intempérante et en désobéissant à ses médecins.

Le moyen utilisé par aristote pour réfuter l'objection est le raisonnement par l'absurde, qui consiste à montrer que si on admettait l'objection, on aboutirait à une contradiction ou à une absurdité.

L'enjeu de cette réfutation est de renforcer la thèse de la responsabilité personnelle des hommes, et de les rendre conscients des conséquences de leurs actions.

Dans un troisième temps, aristote reconnaît que les hommes ne peuvent pas changer facilement de caractère une fois qu'ils l'ont acquis, même s'ils le souhaitent.

Il compare la situation de l'homme injuste ou intempérant à celle du malade ou de celui qui a lancé une pierre : il n'est plus possible pour eux de revenir en arrière, car le principe de leur acte était en eux.

Le moyen utilisé par aristote pour illustrer cette idée est la métaphore, qui permet de rendre plus sensible et plus frappante la difficulté à changer de caractère.

L'enjeu de cette idée est de montrer que le caractère moral est le résultat d'un processus irréversible, et qu'il faut donc être vigilant dès le début à choisir les bonnes actions.