• Durkheim
L'analyse idéologique : substituer les notions à  la réalité
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Le contexte :

Dans cet extrait de son ouvrage "ràùgles de la méthode sociologique", durkheim souligne comment l'homme tend à  substituer ses idées à  la réalité, privilégiant une analyse idéologique plutàït qu'une science des réalités. il met en avant le ràïle de la réflexion dans la construction de nos notions et souligne que la science utilise ces notions préexistantes pour s'en servir de maniàùre plus méthodique.

L' auteur :

Durkheim

(1858-1917) Est le père fondateur de la sociologie, une science qui se distingue de la philosophie pour établir des bases scientifiques à l'étude des phénomènes sociaux.

Le repère :

analyse/synthèse

Le texte :

« Au moment ou? un ordre nouveau de phe?nome?nes devient objet de science, ils se trouvent de?ja? repre?sente?s dans l'esprit, non seulement par des images sensibles, mais par des sortes de concepts grossie?rement forme?s. Avant les premiers rudiments de la physique et de la chimie, les hommes avaient de?ja? sur les phe?nome?nes physico-chimiques des notions qui de?passaient la pure perception ; telles sont, par exemple, celles que nous trouvons me?le?es a? toutes les religions. C'est que, en effet, la re?flexion est ante?rieure a? la science qui ne fait que s'en servir avec plus de me?thode. L'homme ne peut pas vivre au milieu des choses sans s'en faire des ide?es d'apre?s lesquelles il re?gle sa conduite. Seulement, parce que ces notions sont plus pre?s de nous et plus a? notre porte?e que les re?alite?s auxquelles elles correspondent, nous tendons naturellement a? les substituer a? ces dernie?res et a? en faire la matie?re me?me de nos spe?culations. Au lieu d'observer les choses, de les de?crire, de les comparer, nous nous contentons alors de prendre conscience de nos ide?es, de les analyser, de les combiner. Au lieu d'une science de re?alite?s, nous ne faisons plus qu'une analyse ide?ologique. Sans doute, cette analyse n'exclut pas ne?cessairement toute observation. On peut faire appel aux faits pour confirmer ces notions ou les conclusions qu'on en tire. Mais les faits n'interviennent alors que secondairement, a? titre d'exemples ou de preuves confirmatoires ; ils ne sont pas l'objet de la science. Celle-ci va des ide?es aux choses, non des choses aux ide?es. »
Durkheim, Re?gles de la me?thode sociologique (1894)

L'analyse :

Voici un possible développement de l'analyse du texte : dans ce texte, durkheim expose les difficultés et les pièges que rencontre la science lorsqu'elle s'attache à un nouvel objet d'étude.

Il distingue deux types de notions que l'esprit humain peut se faire des phénomènes : les images sensibles, qui relèvent de la perception, et les concepts grossiers, qui relèvent de la réflexion.

Il montre que ces notions sont insuffisantes et trompeuses pour la science, qui doit s'appuyer sur l'observation, la description et la comparaison des réalités.



- il commence par affirmer que les phénomènes qui deviennent objet de science sont déjà représentés dans l'esprit par des images sensibles et des concepts grossiers.

Il donne l'exemple des notions physico-chimiques qui sont mêlées aux religions avant l'émergence de la physique et de la chimie.

Il explique que la réflexion est antérieure à la science, qui n'en est qu'un usage plus méthodique.

Il souligne ainsi que l'homme a besoin de se faire des idées sur les choses pour régler sa conduite, mais que ces idées ne sont pas forcément conformes aux réalités qu'elles visent.



- il poursuit en montrant que le danger de ces notions est qu'elles tendent à se substituer aux réalités et à devenir l'objet des spéculations.

Il oppose alors deux démarches : celle qui consiste à prendre conscience de nos idées, à les analyser et à les combiner, qu'il appelle une analyse idéologique, et celle qui consiste à observer les choses, à les décrire et à les comparer, qu'il appelle une science de réalités.

Il critique la première démarche, qui néglige les faits et qui part des idées pour aller aux choses, au lieu de partir des choses pour aller aux idées.



- il termine en reconnaissant que l'analyse idéologique peut faire appel aux faits, mais seulement de manière secondaire, pour confirmer ses notions ou ses conclusions.

Il dénonce alors le rôle subalterne et accessoire que cette analyse réserve aux faits, qui ne sont pas l'objet de la science, mais seulement des exemples ou des preuves confirmatoires.

Il réaffirme ainsi la primauté de la science de réalités, qui va des choses aux idées.

On peut conclure que durkheim défend une conception empiriste et positiviste de la science, qui repose sur l'observation rigoureuse et objective des faits, et qui se méfie des préjugés et des idéologies.

Il invite ainsi à dépasser les images sensibles et les concepts grossiers, qui sont le produit d'une réflexion spontanée et superficielle, pour accéder aux réalités qui sont le véritable objet de la science.