(1906-1975) Philosophe politique et théoricienne de la pensée politique. Elle a développé des concepts influents tels que "la banalité du mal" et a exploré la nature de la condition humaine, la liberté, et la politique dans un monde moderne marqué par les totalitarismes et la violence.
public/privé
« Manifestement, la liberté ne caractérise pas toute forme de rapports humains et toute espèce de communauté. Là où des hommes vivent ensemble mais ne forment pas un corps politique par exemple, dans les sociétés tribales ou dans l’intimité du foyer les facteurs réglant leurs actions et leur conduite ne sont pas la liberté, mais les nécessités de la vie et le souci de sa conservation. En outre, partout où le monde fait par l’homme ne devient pas scène pour l’action et la parole par exemple dans les communautés gouvernées de manière despotique qui exilent leurs sujets dans l’étroitesse du foyer et empêchent ainsi la naissance d’une vie publique la liberté n’a pas de réalité dans le monde. Sans une vie publique politiquement garantie, il manque à la liberté l’espace du monde où faire son apparition. Certes, elle peut encore habiter le cūur des hommes comme désir, volonté, souhait ou aspiration ; mais le cūur humain, nous le savons tous, est un lieu très obscur, et tout ce qui se passe dans son obscurité ne peut être désigné comme un fait démontrable. La liberté comme fait démontrable et la politique coïncident et sont relatives l’une à l’autre comme deux côtés d’une même chose. »
Arendt, La Crise de la culture (1961)
Voici une possible analyse du texte :
dans ce texte, arendt s'interroge sur la nature et les conditions de la liberté humaine, qu'elle associe à la politique.
Elle distingue trois situations où la liberté n'existe pas ou n'a pas de réalité dans le monde : les rapports humains fondés sur la nécessité, les communautés gouvernées de manière despotique et l'absence d'une vie publique politiquement garantie.
- elle commence par affirmer que la liberté ne caractérise pas toute forme de rapports humains et toute espèce de communauté.
Elle donne comme exemples les sociétés tribales ou l'intimité du foyer, où les hommes vivent ensemble mais ne forment pas un corps politique.
Elle explique que dans ces cas, les facteurs réglant leurs actions et leur conduite ne sont pas la liberté, mais les nécessités de la vie et le souci de sa conservation.
Elle oppose ainsi la liberté à la nécessité, qui est une contrainte extérieure ou intérieure qui limite le choix et l'autonomie des hommes.
Elle suggère que la liberté implique une dimension politique, c'est-à-dire un espace où les hommes peuvent se reconnaître comme égaux et se donner des règles communes.
- elle poursuit en affirmant que la liberté n'a pas de réalité dans le monde partout où le monde fait par l'homme ne devient pas scène pour l'action et la parole.
Elle donne comme exemple les communautés gouvernées de manière despotique qui exilent leurs sujets dans l'étroitesse du foyer et empêchent ainsi la naissance d'une vie publique.
Elle explique que dans ces cas, la liberté n'a pas d'existence concrète ni de manifestation visible, elle reste confinée dans le c£ur des hommes comme désir, volonté, souhait ou aspiration.
Elle oppose ainsi la liberté comme fait démontrable à la liberté comme sentiment intérieur, qui est incertain et obscur.
Elle suggère que la liberté implique une dimension publique, c'est-à-dire un espace où les hommes peuvent agir et parler ensemble, se montrer et se reconnaître mutuellement.
- elle conclut en affirmant que la liberté comme fait démontrable et la politique co´ncident et sont relatives l'une à l'autre comme deux côtés d'une même chose.
Elle explique que sans une vie publique politiquement garantie, il manque à la liberté l'espace du monde où faire son apparition.
Elle affirme ainsi que la liberté n'est pas un attribut naturel ou individuel des hommes, mais une réalité historique et collective qui dépend de la possibilité d'une action politique.
Elle suggère que la liberté implique une dimension créatrice, c'est-à-dire un espace où les hommes peuvent faire apparaître quelque chose de nouveau dans le monde.
Ainsi, arendt défend une conception de la liberté qui repose sur trois conditions : l'indépendance par rapport à la nécessité, l'expression publique de l'action et de la parole, et la participation à une vie politique commune.
Elle montre que ces conditions sont menacées par le despotisme, qui réduit les hommes à leur sphère privée et les empêche de se constituer en acteurs du monde.
Elle invite donc à préserver et à cultiver l'espace public comme lieu d'apparition de la liberté.