• Cournot
La temporalité et la prédictibilité des phénomàùnes naturels selon cournot
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Le contexte :

Dans ce texte, cournot pose la question de la relation entre le présent, le passé et l'avenir en ce qui concerne les phénomàùnes naturels. il souligne que si le présent est déterminant pour l'avenir en vertu des lois naturelles, il est en revanche impossible de retracer le passé à  partir de l'état actuel des choses. cournot affirme ainsi que la raison est plus apte à  prédire scientifiquement l'avenir que de comprendre le passé.

L' auteur :

Cournot

(1801 - 1877) Antoine Augustin Cournot, économiste et mathématicien français du XIXe siècle, philosophe de la science économique. Il se démarque en introduisant des concepts mathématiques dans l'analyse économique, jetant ainsi les bases de l'économie mathématique moderne.

Le repère :

nécessaire/contingent

Le texte :

« Bornons-nous […] à considérer les phénomènes naturels où les causes et les effets s'enchaînent, de l'aveu de tout le monde, d'après une nécessité rigoureuse ; alors il sera certainement vrai de dire que le présent est gros de l'avenir, et de tout l'avenir, en ce sens que toutes les phases subséquentes sont implicitement déterminées par la phase actuelle, sous l'action des lois permanentes ou des décrets éternels auxquels la nature obéit ; mais on ne pourra pas dire sans restriction que le présent est de même gros du passé, car il y a eu dans le passé des phases dont l'état actuel n'offre plus de traces, et auxquelles l'intelligence la plus puissante ne saurait remonter, d'après la connaissance théorique des lois permanentes et l'observation de l'état actuel ; tandis que cela suffirait à une intelligence pourvue de facultés analogues à celles de l'homme, quoique plus puissantes, pour lire dans l'état actuel la série de tous les phénomènes futurs, ou du moins pour embrasser une portion de cette série d'autant plus grande que ses facultés iraient en se perfectionnant davantage. Ainsi, quelque bizarre que l'assertion puisse paraître au premier coup d'ūil, la raison est plus apte à connaître scientifiquement l'avenir que le passé. »
Cournot

Les questions :



[A] - Questions d'analyse :
1. Comment l'auteur décrit-il les phénom��nes naturels dans ce texte ?
2. Pourquoi ne peut-on pas dire que le présent est gros du passé sans restriction, selon l'auteur ?
3. Quel est le r��le des lois permanentes ou des décrets éternels dans les phénom��nes naturels, selon l'auteur ?
4. Comment une intelligence avec des facultés analogues à celles de l'homme pourrait-elle lire la série de tous les phénom��nes futurs, selon l'auteur ?

[B] - Éléments de synth��se :
1. Expliquez la phrase "toutes les phases subséquentes sont implicitement déterminées par la phase actuelle, sous l'action des lois permanentes ou des décrets éternels auxquels la nature obéit".
2. Quelle est l'idée principale du texte et quelles sont les étapes de son argumentation ?

[C] - Commentaire :
1. Selon vous, pourquoi l'auteur affirme-t-il que la raison est plus apte à connaître scientifiquement l'avenir que le passé ?
2. À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si les lois permanentes ou les décrets éternels peuvent expliquer tous les phénom��nes naturels.

L'analyse :

Voici un exemple de commentaire linéaire du texte de cournot : dans ce texte, cournot s'interroge sur la possibilité de connaître scientifiquement le passé et l'avenir à partir du présent, en se limitant aux phénomènes naturels soumis à des lois nécessaires.

Il distingue deux sens du rapport entre le présent et l'avenir, et entre le présent et le passé, et il en tire une conclusion surprenante : la raison est plus apte à connaître l'avenir que le passé.

Dans un premier temps, il affirme que le présent est "gros de l'avenir, et de tout l'avenir", c'est-à-dire qu'il contient implicitement tous les événements futurs qui découlent du présent par une chaîne de causes et d'effets.

Il s'appuie sur l'idée que les phénomènes naturels sont régis par des "lois permanentes" ou des "décrets éternels" qui assurent la régularité et la prévisibilité de la nature.

Il utilise une métaphore biologique, celle de la grossesse, pour illustrer le fait que le présent renferme en germe l'avenir, comme un être vivant porte en lui son développement futur.

Il souligne ainsi la continuité et la nécessité du devenir naturel.

Dans un deuxième temps, il nuance cette affirmation en reconnaissant qu'on ne peut pas dire "sans restriction" que le présent est "gros du passé", c'est-à-dire qu'il conserve la trace de tous les événements antérieurs.

Il admet qu'il y a eu dans le passé des phases dont l'état actuel ne garde plus de signes, et qui sont donc irrémédiablement perdues pour la connaissance.

Il invoque deux sources de connaissance possibles : la "connaissance théorique des lois permanentes" et "l'observation de l'état actuel".

Il suggère ainsi que la science repose sur une combinaison entre la raison, qui déduit les conséquences des principes généraux, et l'expérience, qui fournit les données empiriques.

Il indique aussi que ces deux sources sont insuffisantes pour reconstituer le passé intégralement, car il y a des lacunes et des disparitions dans les faits observables.

Dans un troisième temps, il tire la conséquence de cette distinction entre le rapport du présent à l'avenir et le rapport du présent au passé : il affirme que "la raison est plus apte à connaître scientifiquement l'avenir que le passé".

Il reconnaît que cette assertion peut paraître "bizarre au premier coup d'£il", car elle va à l'encontre de l'idée commune selon laquelle le passé est plus certain que l'avenir, puisqu'il est déjà réalisé.

Il justifie sa thèse en faisant appel à l'hypothèse d'une "intelligence pourvue de facultés analogues à celles de l'homme, quoique plus puissantes", qui serait capable de déduire de l'état actuel tous les phénomènes futurs, ou du moins une grande partie d'entre eux.

Il fait ainsi appel à un idéal de connaissance qui dépasse les limites humaines, mais qui reste fondé sur les mêmes principes rationnels.

Il montre ainsi que la science vise à une connaissance universelle et nécessaire du réel, mais qu'elle se heurte à des obstacles pratiques et historiques.

En conclusion, on peut dire que ce texte présente une réflexion épistémologique sur les rapports entre le temps et la connaissance scientifique.

Cournot défend une conception déterministe de la nature, qui implique que le présent contient en lui-même tous les éléments pour connaître l'avenir.

Mais il reconnaît aussi que le passé n'est pas entièrement accessible à la science, car il y a des phénomènes qui ont disparu sans laisser de traces.

Il en déduit que la raison a plus de facilité à prévoir l'avenir qu'à reconstituer le passé, ce qui constitue un paradoxe apparent.

Il s'appuie sur des arguments logiques et empiriques, mais aussi sur une hypothèse imaginaire d'une intelligence supérieure.

Il invite ainsi le lecteur à réviser ses préjugés sur la certitude du passé et l'incertitude de l'aven.