Dans ce texte, hobbes explore les différentes significations des termes "juste" et "injuste". il souligne la distinction entre l'action juste et l'individu juste, et met en évidence la complexité de la justice dans ses multiples dimensions, tant dans le domaine moral que légal.
(1588-1679) Philosophe Contractualiste comme Locke et Rousseau ; selon eux le pouvoir politique serait issu d'un accord passé librement entre les hommes : un contrat social. Hobbes pense ce contrat à l'aune de ce qu'il y avait avant, « l'état de Nature ».
en fait/en droit
« Ces noms de juste et d'injuste, comme aussi ceux de justice et d'injustice, sont équivoques : car ils signifient choses diverses, suivant qu'on les attribue aux personnes ou aux actions. Quand on les applique aux actions justes, juste signifie le même que fait à bon droit, et injuste, fait tout au contraire de l'équité. Celui qui a fait quelque chose justement est nommé innocent, et ne mérite pas pour cela seul le titre de juste ; comme celui qui a commis une injustice est nommé coupable, plutôt qu'injuste. Mais quand ces termes sont appliqués aux personnes, être juste signifie le même que se plaire aux actions justes, s'étudier à rendre la justice, et l'observer partout ponctuellement. Au contraire, être injuste se dit d'une personne qui méprise la justice, et qui ne la mesure pas à ses promesses, mais à sa commodité présente. Par ainsi, il y a différence entre la justice, ou l'injustice, qui se trouvent en l'âme d'une personne, dans le fonds de ses mūurs, et celles qui se voient dans une action, ou dans une omission mauvaise. Et comme il peut échapper à un homme juste une infinité d'actions injustes, il en peut aussi sortir de justes d'une personne injuste. Cela étant, on peut nommer juste, un homme qui fait des actions justes, à cause que les lois les commandent, et qui n'en commet d'autres que par infirmité. Mais on doit appeler injuste, celui qui n'agit justement que par la crainte qu'il a des peines que les lois imposent et qui, en faisant des actions injustes, suit la pente de ses mauvaises inclinations. »
Hobbes
[A] - Questions d'analyse
1) Quelle est la différence entre l'utilisation des termes "juste" et "injuste" lorsqu'ils sont attribués aux actions et lorsqu'ils sont attribués aux personnes ?
2) Comment peut-on définir le terme "juste" lorsqu'il est appliqué aux actions ?
3) Quelle est la signification du terme "injuste" lorsqu'il est attribué aux personnes ?
4) Comment le texte explique-t-il la différence entre la justice et l'injustice présentes dans l'âme d'une personne et celles qui se manifestent dans une action ?
[B] - Éléments de synth��se
1) Expliquez en quoi consiste la différence entre la justice et l'injustice lorsqu'elles sont attribuées aux actions.
2) En vous basant sur les informations précédentes, identifiez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.
[C] - Commentaire
1) Selon vous, pourquoi les termes "juste" et "injuste" peuvent-ils être équivoques ?
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, pouvez-vous expliquer si la justice dépend uniquement des actions ou également de l'état moral d'une personne ? Justifiez votre réponse.
Dans ce texte, hobbes s'intéresse à la notion de justice et d'injustice, et cherche à distinguer les différents sens que ces termes peuvent avoir selon qu'ils s'appliquent aux actions ou aux personnes.
Il veut ainsi montrer que la justice n'est pas une qualité naturelle, mais une règle conventionnelle qui dépend du droit et des lois.
Il commence par définir ce que signifient les mots juste et injuste lorsqu'ils se rapportent aux actions.
Il dit que faire une action juste, c'est faire quelque chose à bon droit, c'est-à-dire conformément à l'équité, qui est le principe d'une répartition égale et proportionnelle des biens et des charges entre les individus.
A l'inverse, faire une action injuste, c'est faire quelque chose qui contredit l'équité, qui viole le droit d'autrui ou qui crée un déséquilibre dans la société.
Celui qui agit ainsi est coupable, mais pas forcément injuste au sens moral du terme.
Il passe ensuite à l'analyse des mots juste et injuste lorsqu'ils qualifient les personnes.
Il dit que être juste, c'est se plaire aux actions justes, c'est-à-dire avoir le go¹t de la justice, s'efforcer de la rendre et de la respecter en toutes circonstances.
Au contraire, être injuste, c'est mépriser la justice, c'est-à-dire ne pas se soucier du droit ni de l'équité, mais seulement de son intérêt personnel ou de sa commodité présente.
Il y a donc une différence entre la justice ou l'injustice qui se trouvent dans l'âme d'une personne, qui relèvent de sa vertu ou de son vice, et celles qui se manifestent dans une action ou une omission mauvaise, qui relèvent du fait ou du droit.
Il conclut en affirmant qu'il peut y avoir un décalage entre les actions et les personnes, c'est-à-dire qu'un homme juste peut commettre des actions injustes par faiblesse, et qu'un homme injuste peut faire des actions justes par crainte des lois.
Il oppose ainsi deux motifs d'agir justement : le respect des lois, qui est une contrainte extérieure, et l'amour de la justice, qui est une disposition intérieure.
Il suggère que le premier est insuffisant pour garantir la justice sociale, et que le second est plus rare et plus noble.
Par ce texte, hobbes nous invite à réfléchir sur les fondements de la justice et sur les moyens de la faire respecter.
Il nous montre que la justice n'est pas une donnée naturelle ou universelle, mais qu'elle dépend du droit positif établi par les hommes dans un contexte historique et politique.
Il nous fait aussi comprendre que la justice n'est pas seulement une affaire de règles ou de sanctions, mais aussi une affaire de volonté et de morale.