• Spinoza
Les limites du pouvoir de la cité sur les convictions intimes
raison - liberté



Le contexte :

Dans ce texte, spinoza remet en question le pouvoir de la cité sur les croyances et les convictions personnelles de chaque individu. il souligne que certaines actions, comme le jugement, l'amour ou la haine, ne peuvent pas être influencées par des promesses ou des menaces, et que la cité ne peut pas imposer des actions qui vont à  l'encontre de la nature humaine.

L' auteur :

Spinoza

(1632 - 1677) Baruch Spinoza, philosophe du XVIIe siècle, propose une vision panthéiste de Dieu et défend la liberté de pensée. Son œuvre remet en question les conceptions traditionnelles de Dieu, de l'homme et de l'univers.

Le repère :

contingent/nécessaire

Le texte :

« Toutes les actions auxquelles nul ne peut être incité ni par des promesses ni par des menaces, sont en dehors des lois de la Cité. Nul par exemple ne peut se dessaisir de sa faculté de juger ; par quelles promesses ou par quelles menaces un homme pourrait-il être amené à croire que le tout n'est pas plus grand que la partie […] ou que le corps qu'il voit être fini est un être infini ? D'une manière générale, comment pourrait-il être amené à croire ce qui est contraire à ce qu'il sent ou pense ? De même, par quelles promesses ou par quelles menaces un homme pourrait-il être amené à aimer ce qu'il hait ou à haïr ce qu'il aime ? Et il faut en dire autant de tout ce dont la nature humaine a horreur à ce point qu'elle le juge pire que tous les maux : qu'un homme porte témoignage contre lui-même, se mette lui-même au supplice, tue son père et sa mère, ne s'efforce pas d'éviter la mort, et autres choses semblables, auxquelles ni promesses ni menaces ne peuvent amener personne. Si cependant l'on prétendait que la Cité a le droit ou le pouvoir de commander de telles choses, ce serait à nos yeux comme si l'on disait qu'un homme a le droit d'être insensé ou de délirer. »
Spinoza

Les questions :

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[A] - Questions d'analyse:**
1) Comment Spinoza définit-il les actions qui sont en dehors des lois de la Cité?
2) Que signifie pour Spinoza le fait de ne pas pouvoir être incité par des promesses ou des menaces?
3) Comment l'auteur utilise-t-il des exemples pour illustrer son argumentation sur les limites du pouvoir de la Cité en mati��re de croyance et de sentiment?
4) Quel point de vue Spinoza présente-t-il sur le pouvoir de la Cité et quelles conséquences en tire-t-il sur la nature humain� **

[B] - Éléments de synth��se:**
1) Expliquez le raisonnement de Spinoza concernant le r��le des promesses et des menaces dans le cadre des actions hors des lois de la Cité.
2) En utilisant les réponses précédentes, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les principaux arguments de Spinoza. **

[C] - Commentaire:**
1) Selon Spinoza, en quoi l'incapacité d'être influencé par des promesses ou des menaces est-elle liée à la notion de liberté individuell� Justifiez votre réponse.

L'analyse :

Voici un exemple de commentaire linéaire du texte de spinoza :

- dans ce texte, spinoza s'interroge sur les limites du pouvoir politique et de l'obéissance des sujets.

Il cherche à déterminer quelles sont les actions qui échappent aux lois de la cité, c'est-à-dire aux règles établies par l'autorité souveraine.



- il commence par affirmer que toutes les actions auxquelles nul ne peut être incité ni par des promesses ni par des menaces sont en dehors des lois de la cité.

Il pose ainsi un critère pragmatique pour distinguer ce qui relève du domaine public de ce qui relève du domaine privé.

Il suggère que le pouvoir politique ne peut agir que sur les motivations externes des sujets, en leur offrant des récompenses ou en leur infligeant des sanctions, mais qu'il ne peut pas atteindre leur for intérieur, c'est-à-dire leur conscience, leur jugement et leurs sentiments.



- il illustre ensuite son propos par plusieurs exemples qui montrent l'impossibilité d'obtenir par la contrainte ou la persuasion des actes qui vont à l'encontre de la raison, de l'amour ou de la nature humaine.

Il prend d'abord l'exemple du jugement, qu'il considère comme une faculté inaliénable de l'homme.

Il affirme qu'aucune promesse ou menace ne peut amener un homme à croire ce qui est manifestement faux ou absurde, comme que le tout n'est pas plus grand que la partie ou que le corps fini est infini.

Il oppose ainsi la vérité, fondée sur l'évidence rationnelle, à la croyance, qui relève de l'opinion ou de la superstition.

Il implique que le pouvoir politique ne peut pas imposer aux sujets une doctrine ou une religion qui contredirait leur raison.



- il poursuit avec l'exemple de l'amour et de la haine, qu'il présente comme des passions irréductibles à des intérêts matériels ou à des craintes.

Il soutient qu'aucune promesse ou menace ne peut amener un homme à aimer ce qu'il hait ou à ha´r ce qu'il aime.

Il oppose ainsi l'affection, fondée sur le sentiment personnel, à la soumission, qui relève de la contrainte ou de la flatterie.

Il implique que le pouvoir politique ne peut pas imposer aux sujets une fidélité ou une hostilité qui contredirait leur coeur.



- il termine avec l'exemple de tout ce dont la nature humaine a horreur, qu'il assimile à des actes contre nature ou contre soi-même.

Il affirme qu'aucune promesse ou menace ne peut amener un homme à se déshonorer, à se torturer, à tuer ses parents ou à se suicider.

Il oppose ainsi la dignité, fondée sur le respect de soi et des autres, à l'abjection, qui relève de la violence ou de la folie.

Il implique que le pouvoir politique ne peut pas imposer aux sujets une conduite ou une morale qui contredirait leur humanité.



- il conclut en rejetant l'idée que la cité ait le droit ou le pouvoir de commander de telles choses, qu'il juge insensées ou délirantes.

Il affirme ainsi la supériorité de la nature humaine sur la loi civile, et revendique pour les sujets une liberté de penser, d'aimer et d'agir selon leur raison, leur coeur et leur conscience.