Hannah arendt explore la perception contemporaine du travail et de l'art dans son ouvrage "condition de l'homme moderne". elle critique la tendance de la société à assimiler toutes les activités sérieuses au travail rémunéré, reléguant ainsi l'Âoeuvre de l'artiste au rang de simple divertissement, perdant ainsi son essence et son importance pour le monde. arendt remet en question cette conception réductrice qui nie la véritable nature de la création artistique.
(1906-1975) Philosophe politique et théoricienne de la pensée politique. Elle a développé des concepts influents tels que "la banalité du mal" et a exploré la nature de la condition humaine, la liberté, et la politique dans un monde moderne marqué par les totalitarismes et la violence.
« Quoi que nous fassions nous sommes censés le faire pour �oegagner notre vie” ; tel est le verdict de la société, et le nombre des gens, des professionnels en particulier, qui pourraient protester a diminué très rapidement. La seule exception que consente la société concerne l'artiste qui, à strictement parler, est le dernier �oeouvrier” dans une société du travail. La même tendance à rabaisser toutes les activités sérieuses au statut du gagne-pain se manifeste dans les plus récentes théories du travail, qui, presque unanimement, définissent le travail comme le contraire du jeu. En conséquence, toutes les activités sérieuses, quels qu'en soient les résultats, reçoivent le nom de travail et toute activité qui n'est nécessaire ni à la vie de l'individu ni au processus vital de la société est rangée parmi les amusements. Dans ces théories qui, en répercutant au niveau théorique l'opinion courante d'une société de travail, la durcissent et la conduisent à ses extrêmes, il ne reste même plus l'�oeūuvre” de l'artiste : elle se dissout dans le jeu, elle perd son sens pour le monde. On a le sentiment que l'amusement de l'artiste remplit la même fonction dans le processus vital de travail de la société que le tennis ou les passe-temps dans la vie de l'individu. […] Au point de vue du �oegagne-pain” toute activité qui n'est pas liée au travail devient un �oepasse-temps”. »
Arendt, Condition de l'homme moderne
[A] û Questions d'analyse
1) Quelle est la perspective de la société sur le travail et comment cela est-il exprimé dans le texte ?
2) Que signifie l'auteur par "gagner notre vie" et comment cela s'applique-t-il à la société ?
3) Comment le texte dépeint-il la relation entre le travail et l'art ? Quelle est la distinction faite par l'auteur ?
4) En quoi les théories contemporaines sur le travail influencent-elles la perception de l'artiste et de son travail ?
[B] û Éléments de synth��se
1) Expliquez la phrase : "Au point de vue du 'gagne-pain', toute activité qui n'est pas liée au travail devient un 'passe-temps'."
2) En vous aidant des éléments précédents, dégagez lÆidée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.
[C] û Commentaire
1) Selon vous, pourquoi la société tend-elle à assimiler toutes les activités sérieuses au "gagne-pain" ? Justifiez votre réponse.
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si l'auteur sugg��re que l'art perd de son importance dans une société centrée sur le travail. Argumentez votre réponse.
Voici un exemple de développement possible :
dans ce texte, arendt critique la conception dominante du travail dans la société moderne, qui le réduit à un moyen de gagner sa vie et qui oppose le travail au jeu.
Elle montre les conséquences de cette conception sur la valeur accordée aux activités humaines et sur le sens de l'£uvre d'art.
- elle commence par affirmer que la société impose à tous les individus de travailler pour ôgagner leur vieö, c'est-à-dire pour subvenir à leurs besoins matériels et assurer leur survie.
Elle souligne que cette exigence sociale ne laisse aucune place à d'autres motivations ou finalités du travail, comme la réalisation de soi, la contribution au bien commun ou la création de biens durables.
Elle note que seuls les artistes échappent à cette logique, car ils sont les derniers ôouvriersö qui produisent des £uvres qui ont une valeur en elles-mêmes et non pas seulement comme moyens de subsistance.
- elle poursuit en analysant les théories du travail qui reflètent et renforcent cette conception utilitariste et réductrice du travail.
Elle observe que ces théories définissent le travail comme le contraire du jeu, ce qui implique que toute activité sérieuse, qui requiert un effort, une compétence ou une responsabilité, est assimilée au travail, tandis que toute activité qui n'est pas nécessaire à la vie individuelle ou sociale est reléguée au rang des amusements.
Elle en déduit que ces théories ne reconnaissent pas l'existence d'une catégorie intermédiaire entre le travail et le jeu, celle de l'action, qui correspond aux activités politiques, morales ou spirituelles qui visent à transformer le monde et non pas seulement à le maintenir.
- elle termine en montrant les effets de cette conception du travail sur le statut de l'artiste et de son £uvre.
Elle constate que l'artiste n'est plus considéré comme un créateur d'£uvres qui ont un sens pour le monde, mais comme un simple joueur qui s'amuse.
Elle suggère que l'£uvre d'art perd ainsi sa dimension symbolique, sa capacité à exprimer une vision du monde, à susciter des émotions ou à provoquer des réflexions.
Elle indique que l'art devient un ôpasse-tempsö parmi d'autres, qui n'a pas plus d'importance que le tennis ou les hobbies.
Arendt dénonce donc la réduction du travail à un gagne-pain et la dévalorisation des activités humaines qui ne sont pas liées au travail.
Elle invite à reconsidérer le sens du travail, du jeu et de l'action, ainsi qu'à redonner à l'art sa place dans le monde.