• Locke
L'influence des sentiments sur les opinions
liberté - religion



L' auteur :

Locke

(1632-1704) Philosophe du mouvement de l'empirisme anglais, qui stipule que toute connaissance dérive par nature de l'expérience. Toute sa philosophie fait découler des implications pratiques à partir de ce constat.

Le repère :

persuader/convaincre

Le texte :

« Si la force ne peut se rendre maîtresse des opinions des hommes, ni en implanter de nouvelles dans leurs cūurs, en revanche, la courtoisie, l'amitié et la douceur sont capables de ce genre d'effets ; beaucoup d'hommes, que leurs occupations et la paresse empêchent de se livrer à l'examen, n'adoptent leurs opinions que sur la foi d'autrui, même en matière de religion ; mais jamais ils ne consentent à les recevoir de gens dont ils ne sont pas assurés qu'ils sont savants, bienveillants et sincères ; or, ils ne sauraient prêter de telles qualités à quelqu'un qui les persécute. Quant à ceux qui cherchent, il est vrai qu'ils n'adhèrent pas à l'opinion d'un autre en raison des seules bonnes dispositions de celui-ci ; mais ils seront d'autant plus disposés à être convaincus et à chercher les raisons qui pourraient les persuader de partager l'opinion de quelqu'un qu'ils sont obligés de chérir. La force est un mauvais moyen pour faire que les dissidents reviennent de leurs opinions ; en revanche, lorsque vous les convainquez de partager votre propre opinion, vous les attachez solidement au char de l'État ; mais pour ceux qui demeurent fermes en leurs convictions, et qui continuent d'avoir des opinions différentes, la force ne réussira certainement pas à en faire pour vous des amis. »
Locke, Essai sur la tolérance

Les questions :



[a] û questions dÆanalyse
1) En quoi la courtoisie, l'amitié et la douceur sont-elles plus efficaces que la force pour influencer les opinions des hommes ?
2) Comment l'auteur explique-t-il que certains hommes adoptent leurs opinions sur la foi d'autrui ?
3) Quelles sont les qualités que les hommes prêtent à ceux dont ils adh��rent aux opinions ?
4) Pourquoi les dissidents sont-ils moins enclins à changer d'opinion sous l'influence de la force ?

[b] û éléments de synth��se
1) Expliquez la signification de l'expression "attacher solidement au char de l'État" employée dans le texte.
2) Quelle est l'idée principale du texte et quelles sont les étapes de son argumentation ?

[c] û commentaire
1) Selon vous, pourquoi la courtoisie, l'amitié et la douceur sont-elles plus efficaces que la force pour influencer les opinions des hommes ?

L'analyse :

Voici un exemple de développement possible : dans ce texte, locke défend l'idée que la tolérance est la meilleure façon de traiter les dissidents religieux, c'est-à-dire ceux qui ont des opinions différentes de la religion officielle de l'état.

Il oppose deux moyens d'agir à l'égard des dissidents : la force et la persuasion.

Il commence par montrer que la force est inefficace pour changer les opinions des hommes, car elle ne peut pas atteindre leurs c£urs ni leur faire accepter de nouvelles croyances.

Il affirme que les hommes ne se fondent pas sur la contrainte pour adopter leurs opinions, mais sur la confiance qu'ils accordent à ceux qui les leur proposent.

Il prend l'exemple de ceux qui n'ont pas le temps ou l'envie de se livrer à l'examen des arguments, et qui suivent l'autorité d'autrui en matière de religion.

Il explique que ces hommes ne peuvent pas croire quelqu'un qui les persécute, car ils ne lui reconnaissent pas les qualités de savoir, de bienveillance et de sincérité nécessaires pour être crédible.

Il poursuit en examinant le cas de ceux qui cherchent par eux-mêmes la vérité, et qui ne se laissent pas influencer par les sentiments.

Il reconnaît que ces hommes ne se rallient pas à l'opinion d'un autre simplement parce qu'il est aimable, mais il soutient qu'ils sont plus disposés à écouter ses raisons et à se laisser convaincre s'ils ont de l'affection pour lui.

Il oppose donc la courtoisie, l'amitié et la douceur à la violence, comme des moyens plus efficaces pour persuader les dissidents.

Il termine en exposant les conséquences politiques de sa thèse.

Il affirme que la tolérance permet d'attacher les dissidents au char de l'état, c'est-à-dire de les intégrer à la société civile et de les rendre fidèles au pouvoir.

Il oppose cette situation à celle où la force est employée, et qui ne peut que susciter la haine et l'hostilité des dissidents.

Il conclut donc que la tolérance est non seulement plus respectueuse des consciences individuelles, mais aussi plus favorable à la paix et à l'ordre public.