• Bergson
La démocratie comme signe avant-coureur de l'histoire
temps - vérité



Le contexte :

Dans ce texte, bergson interroge la maniàùre dont l'historien du futur interprétera notre présent. il souligne que la démocratie, en tant que fait capital des temps modernes, ne pouvait être perà§ue comme un signe avant-coureur par les contemporains, car sa direction et son terme étaient encore inconnus. bergson invite ainsi à  réfléchir sur la complexité de l'interprétation de l'histoire et sur les limites de notre compréhension du présent.

L' auteur :

Bergson

(1859-1941) Remet en question la vision selon laquelle l'histoire viserait un progrès dans les sciences. Il propose une nouvelle philosophie permettant d'analyser le contenu conscient de l'expérience immédiate.

Le repère :

contingent/nécessaire

Le texte :

« Il faut un hasard heureux, une chance exceptionnelle, pour que nous notions justement, dans la réalité présente, ce qui aura le plus d'intérêt pour l'historien à venir. Quand cet historien considérera notre présent à nous, il cherchera surtout l'explication de son présent à lui, et plus particulièrement de ce que son présent contiendra de nouveau. Cette nouveauté, nous ne pouvons en avoir aucune idée aujourd'hui, si ce doit être une création. Comment donc nous réglerions-nous aujourd'hui sur elle pour choisir parmi les faits ceux qu'il faut enregistrer, ou plutôt pour fabriquer des faits en découpant selon cette indication la réalité présente ? Le fait capital des temps modernes est l'avènement de la démocratie. Que dans le passé, tel qu'il fut décrit par les contemporains, nous en trouvions des signes avant-coureurs, c'est incontestable ; mais les indications peut-être les plus intéressantes n'auraient été notées par eux que s'ils avaient su que l'humanité marchait dans cette direction ; or cette direction de trajet n'était pas plus marquée alors qu'une autre, ou plutôt elle n'existait pas encore, ayant été créée par le trajet lui-même, je veux dire par le mouvement en avant des hommes qui ont progressivement conçu et réalisé la démocratie. Les signes avant-coureurs ne sont donc à nos yeux des signes que parce que nous connaissons maintenant la course, parce que la course a été effectuée. Ni la course, ni la direction, ni par conséquent son terme n'étaient donnés quand ces faits se produisaient : donc ces faits n'étaient pas encore des signes. »
Bergson

Les questions :



[A] - Questions d'analyse :
1) Comment l'auteur définit-il la notion de "signes avant-coureurs" dans le texte ?
2) Quelle est la particularité de l'av��nement de la démocratie selon l'auteur ?
3) En quoi la connaissance de la course de l'humanité influe-t-elle sur notre perception des signes avant-coureurs ?
4) Comment l'auteur explique-t-il que les faits du passé ne sont devenus des signes qu'à posteriori ?

[B] - Éléments de synth��se :
1) Expliquez la phrase : "Le fait capital des temps modernes est l'av��nement de la démocratie. Que dans le passé, tel qu'il fut décrit par les contemporains, nous en trouvions des signes avant-coureurs, c'est incontestable ; mais les indications peut-être les plus intéressantes n'auraient été notées par eux que s'ils avaient su que l'humanité marchait dans cette direction ; or cette direction de trajet n'était pas plus marquée alors qu'une autre, ou plut��t elle n'existait pas encore, ayant été créée par le trajet lui-même, je veux dire par le mouvement en avant des hommes qui ont progressivement conçu et réalisé la démocratie."
2) À partir des informations fournies dans le texte, dégagez l'idée principale ainsi que les étapes de l'argumentation de l'auteur.

[C] - Commentaire :
1) Selon l'auteur, comment peut-on interpréter les signes avant-coureurs dans le passé ?
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte de Bergson, discutez de la relation entre l'expérience présente et la compréhension de l'avenir.

L'analyse :

Voici un exemple de développement possible : dans ce texte, bergson s'interroge sur la possibilité de prévoir l'histoire à partir du présent, et il montre les limites de cette entreprise.

Il développe son argumentation en trois temps :

- d'abord, il pose le problème de la sélection des faits historiques.

Il affirme qu'il faut un hasard heureux, une chance exceptionnelle, pour que nous notions justement, dans la réalité présente, ce qui aura le plus d'intérêt pour l'historien à venir.

Il explique que cet historien cherchera surtout l'explication de son présent à lui, et plus particulièrement de ce que son présent contiendra de nouveau.

Or, cette nouveauté, nous ne pouvons en avoir aucune idée aujourd'hui, si ce doit être une création.

Il soulève donc la difficulté de se régler sur l'avenir pour choisir ou fabriquer des faits historiques pertinents.



- ensuite, il illustre son propos par un exemple concret : le fait capital des temps modernes est l'avènement de la démocratie.

Il reconnaît que dans le passé, tel qu'il fut décrit par les contemporains, nous en trouvons des signes avant-coureurs, mais il ajoute que les indications peut-être les plus intéressantes n'auraient été notées par eux que s'ils avaient su que l'humanité marchait dans cette direction.

Il met donc en évidence le rôle de la connaissance rétrospective dans la perception des faits historiques.



- enfin, il tire la conclusion de son analyse : la direction de trajet n'était pas plus marquée alors qu'une autre, ou plutôt elle n'existait pas encore, ayant été créée par le trajet lui-même, je veux dire par le mouvement en avant des hommes qui ont progressivement conçu et réalisé la démocratie.

Il affirme donc que les signes avant-coureurs ne sont à nos yeux des signes que parce que nous connaissons maintenant la course, parce que la course a été effectuée.

Il nie ainsi l'existence d'une finalité ou d'une nécessité dans l'histoire, et il insiste sur le caractère imprévisible et créateur du mouvement humain.

Bergson nous invite donc à renoncer à l'illusion d'une histoire prévisible et à reconnaître le rôle du hasard et de la liberté dans le devenir historique.