• Hegel
L'inaliénabilité de la personnalité, de la moralité et de la religion
conscience - liberté



Le contexte :

Dans cet extrait de la "propédeutique philosophique" de hegel, il est question de l'inaliénabilité de la personnalité, de la moralité et de la religion. l'auteur soutient que ces aspects fondamentaux de l'existence humaine ne peuvent pas être extériorisés ou abandonnés à  autrui, car ils sont intrinsàùquement liés à  la liberté de volonté et à  la responsabilité individuelle.

L' auteur :

Hegel

(1770-1831) Clôt le système de l'Idéalisme allemand de Kant, Fichte et Schelling en fondant un dernier système philosophique permettant d'expliquer rationnellement la Nature, l'Homme et l'Esprit. Il est à l'origine de la méthode dialectique.

Le repère :

objectif/subjectif/intersubjectif

Le texte :

« Ne sont aliénables que les biens qui, par nature, sont déjà susceptibles d'être extériorisés. Ainsi je ne puis considérer la personnalité comme une chose qui me soit extérieure, car dans la mesure où quelqu'un s'est démis de sa personnalité, il s'est réduit lui-même à l'état de simple chose. Pareille aliénation serait nulle et non avenue. - Un homme aliènerait sa moralité s'il prenait, par exemple, l'engagement vis-à-vis d'un autre homme d'accomplir sur son ordre tous comportements possibles, tant criminels qu'indifférents. Un tel engagement serait sans force, car il concerne la liberté du vouloir, c'est-à-dire ce dont chacun est pour lui-même responsable. Moraux ou immoraux, les actes sont les comportements propres de celui qui les accomplit, et telle est leur nature que je ne puisse les aliéner. - Je ne puis davantage aliéner ma religion. Si une communauté ou même un individu avait abandonné à un tiers le soin de décider de ce que doit être sa croyance, ce serait là un engagement que chacun pourrait rompre unilatéralement, sans commettre aucune injustice à l'égard de ce tiers, puisque ce que je lui aurais abandonné ne pouvait, en aucun cas, devenir sa propriété. »
Hegel, Propédeutique philosophique

L'analyse :



- le texte traite de la question de l'aliénation, c'est-à-dire du fait de se déposséder de quelque chose qui nous appartient ou qui nous constitue.

Hegel cherche à déterminer quels sont les biens qui peuvent être aliénés et ceux qui ne le peuvent pas.



- il commence par poser un critère général pour distinguer les biens aliénables des biens inaliénables : il s'agit de la possibilité d'extérioriser ou non ces biens, c'est-à-dire de les séparer de soi et de les transférer à autrui.

Il affirme que seuls les biens extériorisables sont aliénables, et que les biens qui font partie intégrante de notre être ne peuvent pas être aliénés sans nous réduire à l'état de chose.

Il illustre ce point en prenant l'exemple de la personnalité, qui est le principe de notre identité et de notre autonomie.

Il en déduit que l'aliénation de la personnalité serait nulle et non avenue, c'est-à-dire sans effet juridique ni moral.



- il poursuit en examinant trois cas particuliers de biens qui ne sont pas extériorisables et donc inaliénables : la moralité, la liberté du vouloir et la religion.

Il explique que ces trois biens sont liés à notre responsabilité personnelle, à notre conscience morale et à notre conviction intime.

Il montre que si nous nous engagions à aliéner ces biens, par exemple en obéissant aveuglément à un autre homme, en renonçant à notre volonté propre ou en confiant notre croyance à un tiers, nous commettrions un acte contraire à notre dignité humaine et à notre rationalité.

Il conclut que de tels engagements seraient sans force, c'est-à-dire qu'ils pourraient être rompus sans injustice, car ils porteraient sur des biens qui ne peuvent pas être appropriés par autrui.



- le texte a donc pour enjeu de défendre l'idée que certains biens sont essentiels à notre humanité et à notre liberté, et qu'ils ne peuvent pas faire l'objet d'un contrat ou d'un échange.

Hegel veut ainsi montrer que l'aliénation n'est pas un phénomène universel ni inévitable, mais qu'elle dépend du type de bien considéré.

Il veut aussi souligner que l'aliénation est une atteinte à notre rationalité, car elle implique de renier ce qui fait de nous des êtres pensants et capables de juger par nous-mêmes.