• Sartre
La perception limitée et la pensée synthétique
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Le contexte :

Dans cet extrait de "l'imaginaire" de sartre, l'auteur explore la nature de la perception et de la pensée. en observant le cas d'un cube, il souligne les limitations de la perception qui ne permet de voir qu'une partie de l'objet à  la fois, tandis que la pensée synthétique permet de saisir l'objet dans son ensemble. cette distinction met en évidence la nécessité d'apprendre les objets à  travers différents points de vue et souligne la différence fondamentale entre la pensée et la perception.

L' auteur :

Sartre

(1905-1980) Philosophe existentialiste français majeur du 20e siècle, Sartre a exploré la notion de la liberté, de la responsabilité individuelle et de l'absurdité de l'existence humaine. Il a développé des idées sur l'existentialisme, la mauvaise foi et l'authenticité.

Le repère :

objectif/subjectif/intersubjectif

Le texte :

« Dans la perception j'observe les objets. Il faut entendre par là que l'objet, quoiqu'il entre tout entier dans ma perception, ne m'est jamais donné que d'un côté à la fois. On connaît l'exemple du cube : je ne puis savoir que c'est un cube tant que je n'ai pas appréhendé ses six faces ; je puis à la rigueur en voir trois à la fois, mais jamais plus. Il faut donc que je les appréhende successivement. Et lorsque je passe, par exemple, de l'appréhension des faces ABC à celle des faces BCD, il reste toujours une possibilité pour que la face A se soit anéantie durant mon changement de position. L'existence du cube demeurera donc douteuse. En même temps, nous devons remarquer que lorsque je vois trois faces du cube à la fois, ces trois faces ne se présentent jamais à moi comme des carrés : leurs lignes s'aplatissent, leurs angles deviennent obtus, et je dois reconstituer leur nature de carrés à partir des apparences de ma perception. On doit apprendre les objets, c'est-à-dire multiplier sur eux les points de vue possibles. L'objet lui-même est la synthèse de toutes ces apparitions. Lorsque, par contre, je pense au cube par un concept, je pense ses six côtés et ses huit angles à la fois ; je pense que ses angles sont droits, ses côtés carrés. Je suis au centre de mon idée, je la saisis tout entière d'un coup. Cela ne veut naturellement pas dire que mon idée n'ait pas besoin de se compléter par un progrès infini. Mais je puis penser les essences en un seul acte de conscience ; je n'ai pas à rétablir d'apparences, je n'ai pas d'apprentissage à faire. Telle est sans doute la différence la plus nette entre la pensée et la perception. »
Sartre, L'Imaginaire

Les questions :



[A] - Questions d'analyse :
1) Quelle est la particularité de la perception des objets selon l'auteur ?
2) Comment l'auteur utilise-t-il l'exemple du cube pour illustrer son propos ?
3) Quelle est la conséquence de l'observation simultanée de trois faces du cube ?
4) Quelle est la différence entre la perception et la pensée selon l'auteur ?

[B] - Éléments de synth��se :
1) Expliquez la phrase : "Lorsque je pense au cube par un concept, je pense que ses angles sont droits, ses c��tés carrés."
2) En vous aidant des éléments précédents, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.

L'analyse :

Voici un exemple de commentaire possible du texte : le texte de sartre porte sur la différence entre la perception et la pensée, deux modes de connaissance des objets.

L'auteur cherche à montrer que la perception est toujours partielle, incertaine et déformée, tandis que la pensée est totale, certaine et fidèle.



- dans le premier paragraphe, sartre expose le problème de la perception en prenant l'exemple du cube.

Il montre que la perception ne peut jamais saisir l'objet dans sa totalité, mais seulement d'un côté à la fois.

Il en résulte que l'existence de l'objet reste douteuse, car il y a toujours une possibilité que l'objet change ou disparaisse quand on change de point de vue.

Sartre utilise ici un raisonnement par l'absurde pour mettre en évidence les limites de la perception.



- dans le deuxième paragraphe, sartre poursuit son analyse en montrant que la perception ne peut pas non plus saisir l'objet dans sa vérité, mais seulement dans ses apparences.

Il explique que les faces du cube ne se présentent pas à nous comme des carrés, mais comme des figures déformées par la perspective.

Il faut donc reconstituer leur nature à partir de ces apparences, ce qui implique un travail d'apprentissage.

Sartre utilise ici un raisonnement par l'exemple pour illustrer les difficultés de la perception.



- dans le troisième paragraphe, sartre oppose la pensée à la perception en montrant qu'elle permet de connaître l'objet dans son essence, c'est-à-dire dans ce qu'il est indépendamment de nos points de vue.

Il explique que la pensée saisit le cube par un concept, qui englobe ses six faces, ses huit angles, ses propriétés géométriques.

Il souligne que la pensée n'a pas besoin de multiplier les points de vue ni de rétablir les apparences, car elle est au centre de son idée et la saisisse tout entière d'un coup.

Sartre utilise ici un raisonnement par la définition pour caractériser la pensée.

Le texte de sartre vise donc à établir une distinction nette entre la perception et la pensée, en mettant en valeur les avantages de cette dernière sur la première.

Il s'inscrit dans une perspective rationaliste, qui privilégie le concept sur le sensible.

Il invite à remettre en question notre confiance dans nos sens et à développer notre capacité à penser les essences des objets.