Le texte :
« S'il était aussi facile de commander aux esprits qu'aux langues, tout souverain règnerait sans danger et aucun pouvoir politique n'aurait besoin de violence : en effet, chacun vivrait selon le bon plaisir des gouvernants et jugerait selon leur seul décret de ce qui est vrai ou faux, bien ou mal, juste ou injuste. Mais […] il ne peut bien entendu se faire que l'esprit d'un homme soit entièrement dépendant d'un autre ; en effet, personne ne peut, de gré ou de force, transférer à un autre son droit naturel, c'est-à-dire sa faculté de raisonner librement et de juger de toutes choses. On peut donc tenir pour violent ce gouvernement qui domine les esprits, et affirmer qu'une majesté souveraine comment à l'égard de ses sujets une injustice, et usurpe leur droit, lorsqu'elle veut prescrire à chacun ce qu'il faut admettre comme vrai ou rejeter comme faux, et aussi quelles opinions doivent pousser chacun à la dévotion envers Dieu. Car ces croyances sont du droit de chacun, un droit dont personne, le voulût-il, ne peut se dessaisir. »
Spinoza, Traité théologico-politique