• Aristote
L'impossibilité de percevoir l'universel
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Le contexte :

Dans ce texte, aristote remet en question la capacité de la sensation à  nous permettre d'accéder à  la connaissance universelle. il souligne que les démonstrations sont universelles, mais que les notions universelles ne peuvent être perà§ues. ainsi, il affirme qu'il n'existe pas de science par la sensation et que la connaissance universelle nécessite la recherche de démonstrations.

L' auteur :

Aristote

(-384--322) Est un des premiers philosophes à considérer scientifiquement et rationnellement le monde. Il a formalisé la logique et le calcul logique, il est à l'origine de la tendance scientifique à classer le monde en catégories.

Le repère :

universel/général/particulier/singulier

Le texte :

« L'universel, ce qui s'applique à tous les cas, est impossible à percevoir, car ce n'est ni une chose déterminée, ni un moment déterminé, sinon ce ne serait pas un universel, puisque nous appelons universel ce qui est toujours et partout. Puisque donc les démonstrations sont universelles, et que les notions universelles ne peuvent être perçues, il est clair qu'il n'y a pas de science par la sensation. Mais il est évident encore que, même s'il était possible de percevoir que le triangle a ses angles égaux à deux droits, nous en chercherions encore une démonstration, et que nous n'en aurions pas (comme certains le prétendent) une connaissance scientifique : car la sensation porte nécessairement sur l'individuel, tandis que la science consiste la connaissance universelle. Aussi, si nous étions sur la Lune, et que nous voyions la Terre s'interposer sur le trajet de la lumière solaire, nous ne saurions pas la cause de l'éclipse : nous percevrions qu'en ce moment il y a éclipse, mais nullement le pourquoi, puisque la sensation, avons-nous dit, ne porte pas sur l'universel, Ce qui ne veut pas dire que par l'observation répétée de cet événement, nous ne puissions, en poursuivant l'universel, arriver à une démonstration, car c'est d'une pluralité de cas particuliers que se dégage l'universel. »
Aristote, Organon, Seconds analytiques

Les questions :



[a] û questions d'analyse
1) Pourquoi l'universel est-il impossible à percevoir ?
2) En quoi consiste la différence entre la sensation et la science ?
3) Selon Aristote, pourquoi la sensation ne peut-elle pas être une base pour la science ?
4) Comment peut-on arriver à une démonstration à partir de cas particuliers ?

[b] û éléments de synth��se
1) Expliquez le sens de la phrase : "puisque donc les démonstrations sont universelles, et que les notions universelles ne peuvent être perçues, il est clair qu'il n'y a pas de science par la sensation."
2) En vous aidant des éléments précédents, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.

[c] û commentaire
1) Pourquoi Aristote affirme-t-il que la sensation ne porte pas sur l'universel ?
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si la science peut se passer de la sensation dans l'acquisition des connaissances universelles.

L'analyse :

Voici une possible analyse du texte d'aristote :

- dans le premier paragraphe, aristote affirme que l'universel, c'est-à-dire ce qui vaut pour tous les cas sans exception, est impossible à percevoir par les sens, car la sensation ne saisit que des choses et des moments déterminés, qui sont particuliers et variables.

Il en déduit qu'il n'y a pas de science par la sensation, car la science vise à établir des démonstrations universelles, fondées sur des notions universelles qui ne relèvent pas de l'expérience sensible.

Aristote oppose donc la science et la sensation, en montrant que la première requiert un niveau d'abstraction et de généralisation que la seconde ne peut pas atteindre.



- dans le deuxième paragraphe, aristote illustre son propos par un exemple : même si nous pouvions percevoir par les sens que le triangle a ses angles égaux à deux droits, nous n'aurions pas pour autant une connaissance scientifique de cette propriété, car nous ne saurions pas pourquoi elle est vraie dans tous les cas.

Nous aurions seulement une connaissance empirique, fondée sur l'observation d'un cas particulier.

Aristote souligne ainsi que la science ne se contente pas de constater des faits, mais qu'elle cherche à en expliquer les causes et les principes.



- dans le troisième paragraphe, aristote poursuit son exemple en imaginant que nous soyons sur la lune et que nous voyions la terre faire une éclipse de soleil.

Il dit que nous ne saurions pas la cause de ce phénomène, car nous ne percevrions que l'effet individuel et contingent.

Nous n'aurions pas accès à l'universel, c'est-à-dire à la loi générale qui régit les mouvements des astres.

Il nuance toutefois son propos en ajoutant que par l'observation répétée de cet événement, nous pourrions, en cherchant l'universel, arriver à une démonstration.

Il reconnaît donc que la sensation peut être un point de départ pour la science, à condition qu'elle soit dépassée par le raisonnement qui dégage l'universel à partir d'une pluralité de cas particuliers.

Aristote défend donc dans ce texte une conception de la science comme connaissance universelle et démonstrative, qui s'oppose à la sensation comme connaissance particulière et empirique.