• Freud
La superstition comme complément logique
conscience - science



Le contexte :

Dans cet extrait de la psychopathologie de la vie quotidienne, freud analyse la superstition comme une vision du monde justifiée dans les époques préscientifiques. il met en évidence la tendance des hommes à  interpréter les accidents et les hasards comme des actions intentionnelles, montrant ainsi leur comportement paranoÂïaque et leur capacité à  formuler des jugements sur le caractàùre des autres.

L' auteur :

Freud

(1859-1939) Avance l'idée que la conscience n'est pas, comme le pensait Descartes, une machine à enregistrer toutes les informations. Au contraire, elle va refouler dans une partie plus profonde et hors de l'aperception d'elle-même des souvenirs.

Le repère :

essentiel/accidentel

Le texte :

« Lorsque les hommes ont commencé à penser, ils furent obligés de résoudre anthropomorphiquement le monde en une multitude de personnalités faites à leur image ; les accidents et les hasards qu'ils interprétaient superstitieusement étaient donc à leurs yeux des actions, des manifestations de personnes ; autrement dit, ils se comportaient exactement comme les paranoïaques, qui tirent des conclusions du moindre signe fourni par d'autres, et comme se comportent tous les hommes sains qui, avec raison, formulent des jugements sur le caractère de leurs semblables en se basant sur leurs actions accidentelles et non-intentionnelles. Dans notre conception du monde moderne, conception scientifique, et qui est encore loin d'être achevée dans toutes ses parties, la superstition apparaît donc quelque peu déplacée ; mais elle était justifiée dans la conception des époques préscientifiques, puisqu'elle en était un complément logique. Le Romain, qui renonçait à un important projet, parce qu'il venait de constater un vol d'oiseaux défavorable, avait donc relativement raison ; il agissait conformément à ses prémisses. Mais lorsqu'il renonçait à son projet, parce qu'il avait fait un faux-pas sur le seuil de sa porte. Il se montrait supérieur à nous autres incrédules, il se révélait meilleur psychologue que nous le sommes. C'est que ce faux-pas était pour lui une preuve de l'existence d'un doute, d'une opposition intérieure à ce projet, doute et opposition dont la force pouvait annihiler celle de son intention au moment de l'exécution du projet. On n'est en effet sûr du succès complet que lorsque toutes les forces de l'âme sont tendues vers le but désiré. »
Freud, Psychopathologie de la vie quotidienne

Les questions :



[A] û Questions dÆanalyse
1) Quelle est la relation entre la résolution anthropomorphique du monde et l'interprétation superstitieuse des accidents et des hasards ?
2) Que signifie le comportement des parano��aques et des hommes sains dans le contexte de l'interprétation superstitieuse ?
3) Comment la conception du monde moderne diff��re-t-elle de celle des époques préscientifiques en ce qui concerne la superstition ?
4) Comment le faux-pas sur le seuil de la porte peut-il être interprété comme une preuve de l'existence d'un doute et d'une opposition intérieure ?

[B] û Éléments de synth��se
1) Expliquez la phrase : "On n'est en effet s��r du succ��s complet que lorsque toutes les forces de l'âme sont tendues vers le but désiré."

L'analyse :



- dans ce texte, freud compare la superstition à la parano´a et à la psychologie, en montrant comment les hommes interprètent les signes du monde selon leur conception du monde.



- il commence par affirmer que les hommes ont commencé à penser en attribuant des personnalités humaines aux phénomènes naturels, ce qui les conduisait à voir des actions et des manifestations de volonté dans les accidents et les hasards.

Il dit que cette attitude est anthropomorphique, c'est-à-dire qu'elle projette la forme et les qualités de l'homme sur le monde.

Il dit aussi que cette attitude est semblable à celle des parano´aques, qui tirent des conclusions hâtives et erronées à partir de signes insignifiants fournis par d'autres personnes.

Il dit enfin que cette attitude est commune à tous les hommes sains, qui jugent le caractère de leurs semblables en se basant sur leurs actions accidentelles et non-intentionnelles.



- il poursuit en opposant cette conception du monde préscientifique, fondée sur la superstition, à la conception du monde moderne, fondée sur la science.

Il dit que la superstition apparaît déplacée dans le monde moderne, car elle n'est pas conforme aux faits et aux lois de la nature.

Mais il dit aussi que la superstition était justifiée dans le monde préscientifique, car elle en était un complément logique.

Il donne l'exemple du romain qui renonçait à un projet à cause d'un vol d'oiseaux défavorable, qui agissait selon ses prémisses, c'est-à-dire selon sa croyance en la divination par les augures.



- il termine en montrant que le romain qui renonçait à son projet à cause d'un faux-pas sur le seuil de sa porte était plus perspicace que nous, car il savait interpréter son propre inconscient.

Il dit que ce faux-pas était le signe d'un doute ou d'une opposition intérieure à son projet, qui pouvait compromettre sa réussite.

Il dit que le succès n'est assuré que lorsque toutes les forces de l'âme sont tendues vers le but désiré.



- le texte de freud vise donc à mettre en évidence les différentes manières dont les hommes interprètent les signes du monde selon leur conception du monde, et à souligner l'importance de prendre en compte l'inconscient dans la compréhension de soi et des autres.

Il montre ainsi que la superstition n'est pas seulement une erreur ou une illusion, mais aussi une expression de la pensée humaine et de ses conflits internes.