Dans ce passage des "propos" d'alain, l'auteur souligne l'importance de ne jamais céder l'obéissance de l'esprit, même envers les autorités ou les dirigeants. alain encourage une attitude critique et vigilante de la part des citoyens, les exhortant à ne pas admettre aveuglément les déclarations ou les actions de leurs dirigeants, afin de préserver la justice, la liberté, et la sécurité.
(1868-1951) Il effectue un mouvement de retour au Cartésianisme en niant l'inconscient Freudien, selon lui ce dernier doit être réduit aux pulsions du corps opposées à la rationalité de l'Esprit.
croire/savoir
« L'esprit ne doit jamais obéissance. Une preuve de géométrie suffit à le montrer ; car si vous la croyez sur parole, vous êtes un sot ; vous trahissez l'esprit. Ce jugement intérieur, dernier refuge, et suffisant refuge, il faut le garder ; il ne faut jamais le donner. Suffisant refuge ? Ce qui me le fait croire, c'est que ce qui subsiste d'esclavage vient bien clairement de ce que le citoyen jette aux pieds du chef son jugement aussi. Il admire ; c'est son bonheur ; et pourtant il sait ce que cela lui coûte. Pour moi, je n'arrive pas à comprendre que […] le bon citoyen, l'ami de l'ordre, l'exécutant fidèle jusqu'à la mort, se permette encore de donner quelque chose de plus, j'entends d'acclamer, d'approuver, d'aimer le chef impitoyable. Mais plutôt je voudrais que le citoyen restât inflexible de son côté, inflexible d'esprit, armé de défiance, et toujours se tenant dans le doute quant aux projets et aux raisons du chef. Cela revient à se priver du bonheur de l'union sacrée, en vue d'éviter de plus grands maux. Par exemple, ne point croire, par un abus d'obéissance, qu'une guerre est ou était inévitable ; ne point croire que les impôts sont calculés au plus juste, et les dépenses de même ; et ainsi du reste. Exercer donc un contrôle clairvoyant, résolu, sans cūur, sur les actions et encore plus sur les discours du chef. Communiquer à ses représentants le même esprit de résistance et de critique, de façon que le pouvoir se sache jugé. Car, si le respect, l'amitié, les égards se glissent par là, la justice et la liberté sont perdues, et la sécurité elle-même est perdue. »
Alain, Propos
[A] - Questions d'analyse
1) Selon l'auteur, pourquoi l'esprit ne doit-il jamais obéissance ?
2) Quelle preuve de géométrie est donnée pour illustrer l'idée que l'esprit ne doit pas croire sur parole ?
3) Comment l'auteur explique-t-il que l'esclavage persiste ?
4) Pourquoi l'auteur pense-t-il que le citoyen ne devrait pas acclamer, approuver ou aimer le chef impitoyable ?
[B] - Éléments de synth��se
1) Expliquez la phrase : "Ce qui me le fait croire, c'est que ce qui subsiste d'esclavage vient bien clairement de ce que le citoyen jette aux pieds du chef son jugement aussi."
2) En vous aidant des éléments précédents, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de son argumentation.
[C] - Commentaire
1) Êtes-vous d'accord avec l'auteur sur le fait que l'esprit ne doit jamais obéissance ? Justifiez votre réponse.
2) À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si l'idée de contr��ler le chef et de maintenir un esprit de résistance est applicable dans tous les domaines de la vie.
Voici un possible développement de l'analyse du texte :
le texte d'alain est un extrait de ses propos, une série d'articles publiés dans la presse entre 1906 et 1936, où il aborde des questions de philosophie, de politique, de morale et d'éducation.
Dans ce texte, il défend l'idée que l'esprit ne doit jamais obéissance, c'est-à-dire qu'il doit toujours garder son autonomie et son sens critique face à l'autorité.
Il s'agit donc d'un texte argumentatif, qui vise à convaincre le lecteur de la nécessité de résister à la soumission intellectuelle.
L'auteur commence par affirmer sa thèse de manière générale et absolue : "l'esprit ne doit jamais obéissance".
Il s'appuie ensuite sur un exemple tiré de la géométrie, qui est une science fondée sur la démonstration et la raison.
Il montre que croire sur parole une preuve de géométrie, sans la vérifier par soi-même, est une faute contre l'esprit, qui consiste à renoncer à son propre jugement.
Il oppose donc deux attitudes : celle du sot, qui trahit l'esprit en se fiant à l'autorité, et celle du sage, qui garde son jugement intérieur, qu'il qualifie de "dernier refuge" et de "suffisant refuge".
L'auteur utilise ici des termes qui évoquent la protection et la sécurité, pour souligner que l'esprit est menacé par les dangers de la servitude.
Il se demande ensuite si ce refuge est vraiment suffisant, et il répond par l'affirmative, en se fondant sur son observation du monde politique.
Il passe ainsi du domaine scientifique au domaine social, en prenant comme exemple le rapport entre le citoyen et le chef.
Il dénonce le fait que certains citoyens se soumettent non seulement aux ordres, mais aussi aux opinions du chef, qu'ils admirent, approuvent et aiment sans réserve.
Il s'agit là d'un excès d'obéissance, qui conduit à l'aliénation de l'esprit.
L'auteur exprime son incompréhension et sa révolte face à cette attitude, qu'il juge contraire à la dignité humaine.
Il emploie des termes péjoratifs comme "jeter aux pieds", "trahir", "esclavage", "impitoyable", pour dénoncer le caractère humiliant et dangereux de cette soumission.
Il oppose à cette attitude celle qu'il préconise pour lui-même et pour les autres citoyens : rester inflexible d'esprit, armé de défiance, et toujours se tenant dans le doute.
Il s'agit là d'une posture critique, qui consiste à ne pas croire aveuglément ce que dit ou fait le chef, mais à exercer un contrôle clairvoyant, résolu, sans c£ur.
L'auteur utilise des termes qui évoquent la force, la vigilance et la rationalité, pour valoriser cette attitude.
Il reconnaît que cela implique de se priver du bonheur de l'union sacrée, c'est-à-dire de la communion affective avec le chef et les autres citoyens.
Mais il estime que c'est le prix à payer pour éviter de plus grands maux, comme la guerre, l'injustice ou la tyrannie.
Il conclut donc en affirmant que si le respect, l'amitié, les égards se glissent par là, la justice et la liberté sont perdues, et la sécurité elle-même est perdue.
Il s'agit là d'une mise en garde contre les sentiments qui peuvent nuire au jugement critique et favoriser la domination du pouvoir.
On peut donc dire que le texte d'alain est un plaidoyer pour l'autonomie de l'esprit face à l'autorité.
L'auteur utilise des exemples concrets, des oppositions nettes, des termes forts et des questions rhétoriques pour soutenir sa thèse et interpeller le lecteur.
Il montre que l'obéissance n'est pas seulement une affaire de conduite extérieure, mais aussi une affaire d'attitude intérieure.
Il invite donc le lecteur à ne pas renoncer à son jugement propre, mais à le garder comme un refuge suffisant contre les dangers de la servitude.