• Durkheim
La société, condition de l'humanité
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L' auteur :

Durkheim

(1858-1917) Est le père fondateur de la sociologie, une science qui se distingue de la philosophie pour établir des bases scientifiques à l'étude des phénomènes sociaux.

Le repère :

objectif/subjectif/intersubjectif

Le texte :

« Abandonné à lui-même, l'individu tomberait sous la dépendance des forces physiques ; s'il a pu y échapper, s'il a pu s'affranchir, se faire une personnalité, c'est qu'il a pu se mettre à l'abri d'une force sui generis , force intense, puisqu'elle résulte de la coalition de toutes les forces individuelles, mais force intelligente et morale, capable, par conséquent, de neutraliser les énergies inintelligentes et amorales de la nature : c'est la force collective. Permis au théoricien de démontrer que l'homme a droit à la liberté ; mais quelle que soit la valeur de ces démonstrations, ce qui est certain, c'est que cette liberté n'est devenue une réalité que dans et par la société. Ainsi, vouloir la société, c'est, d'une part, vouloir quelque chose qui nous dépasse ; mais c'est en même temps nous vouloir nous-même. Nous ne pouvons vouloir sortir de la société, sans vouloir cesser d'être des hommes. Je ne sais si la civilisation nous a apporté plus de bonheur, et il n'importe ; mais ce qui est certain, c'est que du moment où nous sommes civilisés, nous ne pouvons y renoncer qu'en renonçant à nous-même. La seule question qui puisse se poser pour l'homme est, non pas de savoir s'il peut vivre en dehors d'une société, mais dans quelle société il veut vivre ; et je reconnais d'ailleurs très volontiers à tout individu le droit d'adopter la société de son choix, à supposer qu'il ne soit pas retenu dans sa société natale par des devoirs préalablement contractés. Dès lors, on s'explique sans peine comment la société, en même temps qu'elle constitue une fin qui nous dépasse, peut nous apparaître comme bonne et désirable, puisqu'elle tient à toutes les fibres de notre être. »
Durkheim, Philosophie et sociologie

Les questions :



[A] - Questions d'analyse :
1. En quoi l'individu est-il dépendant des forces physiques ?
2. Qu'est-ce que la force sui generis ?
3. Comment la force collective peut-elle neutraliser les énergies inintelligentes et amorales de la nature ?
4. Quel lien y a-t-il entre la liberté et la société ?

[B] - Éléments de synth��se :
1. Que signifie la phrase "vouloir la société" ?
2. Quelle est l'idée principale du texte et quelles sont les étapes de son argumentation ?

[C] - Commentaire :
1. Pensez-vous que la société est nécessaire à l'existence de l'homme ? Justifiez votre réponse.
2. À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si la civilisation est un choix ou une nécessité.

L'analyse :

Voici un exemple de développement possible : dans ce texte, durkheim défend l'idée que la société est à la fois une réalité qui nous dépasse et une condition de notre liberté et de notre personnalité.

Il s'agit donc de montrer comment il articule ces deux aspects de la société, en s'appuyant sur les éléments du texte.



- dans un premier temps, durkheim affirme que l'individu, s'il était isolé, serait soumis aux forces physiques de la nature, qui sont inintelligentes et amorales.

Il oppose donc la nature et la culture, et montre que l'individu ne peut se libérer de la contrainte naturelle que grâce à la société, qui lui offre une protection et une émancipation.

La société est ainsi présentée comme une force sui generis, c'est-à-dire d'un genre propre, qui résulte de l'union des forces individuelles, mais qui n'est pas réductible à celles-ci.

La société est donc une réalité supérieure à l'individu, qui le dépasse et le transcende.

Durkheim utilise des termes comme "abandonné", "dépendance", "affranchir", "abri", qui soulignent le contraste entre la situation de l'individu hors de la société et celle de l'individu dans la société.



- dans un deuxième temps, durkheim soutient que la liberté individuelle n'est pas un droit naturel, mais une réalité sociale.

Il reconnaît que le théoricien peut démontrer que l'homme a droit à la liberté, mais il affirme que ce droit n'a de sens que dans et par la société, qui le rend possible et effectif.

La société n'est donc pas une entrave à la liberté, mais sa condition.

Durkheim utilise des termes comme "droit", "valeur", "réalité", qui expriment l'idée que la liberté n'est pas un donné, mais une construction sociale.

Il en déduit que vouloir la société, c'est se vouloir soi-même, car c'est par elle que nous pouvons nous faire une personnalité.

La société est donc une réalité intérieure à l'individu, qui le constitue et le définit.

Durkheim utilise des termes comme "vouloir", "personnalité", "nous-même", qui marquent l'idée que la société est liée à notre volonté et à notre identité.



- dans un troisième temps, durkheim admet que la civilisation peut être source de malheur, mais il affirme que nous ne pouvons y renoncer sans renoncer à nous-même.

Il oppose donc le bonheur et la civilisation, et montre que le choix de l'homme n'est pas entre la société et l'absence de société, mais entre les différentes formes de société possibles.

La société est ainsi présentée comme une réalité incontournable, mais aussi comme une réalité variable, qui peut être choisie selon nos préférences.

Durkheim utilise des termes comme "civilisation", "renoncer", "choix", qui indiquent l'idée que la société est à la fois une nécessité et une liberté.

Il en conclut que la société peut nous apparaître comme bonne et désirable, car elle correspond à nos besoins et à nos aspirations.

La société est donc une réalité extérieure à l'individu, mais aussi une réalité subjective, qui dépend de notre jugement.

On peut donc résumer ainsi le propos de durkheim : la société est une force qui nous dépasse (premier temps), mais aussi une condition de notre liberté et de notre personnalité (deuxième temps), et enfin une réalité incontournable mais variable, qui peut être choisie et appréciée (troisième temps).