Dans cet extrait de l'encyclopédie, diderot souligne le lien entre la capacité de réflexion et l'existence d'une langue. selon lui, les animaux sont incapables de former des associations d'idées, ce qui les empêche de penser, de parler et d'inventer. diderot souligne ainsi l'importance de la réflexion dans le développement de l'industrie et du progràùs.
intuitif/discursif
« Une langue suppose une suite de pensées, et c'est par cette raison que les animaux n'ont aucune langue. Quand même on voudrait leur accorder quelque chose de semblable à nos premières appréhensions et à nos sensations grossières et les plus machinales, il parait certain qu'ils sont incapables de former cette association d'idées, qui seule peut produire la réflexion, dans laquelle cependant consiste l'essence de la pensée. C'est parce qu'ils ne peuvent joindre ensemble aucune idée, qu'ils ne pensent ni ne parlent, c'est par la même raison qu'ils n'inventent et ne perfectionnent rien. S'ils étaient doués de la puissance de réfléchir, même au plus petit degré, ils seraient capables de quelque espèce de progrès ; ils acquerraient plus d'industrie ; les castors d'aujourd'hui bâtiraient avec plus d'art et de solidité que ne bâtissaient les premiers castors ; l'abeille perfectionnerait encore tous les jours la cellule qu'elle habite : car si on suppose que cette cellule est aussi parfaite qu'elle peut l'être, on donne à cet insecte plus d'esprit que nous n'en avons ; on lui accorde une intelligence supérieure à la nôtre, par laquelle il apercevrait tout d'un coup le dernier point de perfection auquel il doit porter son ouvrage, tandis que nous-mêmes nous ne voyons jamais clairement ce point, et qu'il nous faut beaucoup de réflexions, de temps et d'habitude pour perfectionner le moindre de nos arts. »
Diderot, Encyclopédie (1751)
[A] û Questions dÆanalyse
1) Quelle est la relation entre une langue et la pensée selon le texte ?
2) Pourquoi les animaux sont-ils incapables de former une association d'idées, selon l'auteur ?
3) En quoi la réflexion est-elle liée à l'essence de la pensée, selon le texte ?
4) Comment l'incapacité des animaux à former des idées influence-t-elle leur capacité à progresser et à inventer, d'apr��s l'auteur ?
[B] û Éléments de synth��se
1) Expliquez la th��se de l'auteur concernant l'incapacité des animaux à penser et à progresser.
2) À partir des réponses aux questions précédentes, dégagez l'idée principale du texte ainsi que les étapes de l'argumentation de Diderot.
[C] û Commentaire
1) Selon vous, quelle est l'importance de la réflexion et de la capacité à former des idées dans le développement de la pensée humaine, et comment cela se compare-t-il à la vision de Diderot ?
2) À la lumi��re de vos connaissances en philosophie et en psychologie, discutez de l'idée de Diderot selon laquelle les animaux sont incapables de progresser et d'inventer en raison de leur absence de réflexion.
Voici une possible analyse du texte de diderot :
- le texte vise à montrer que les animaux sont incapables de penser et de parler, et que leur absence de progrès dans leurs activités témoigne de leur manque de réflexion.
- l'auteur commence par poser une condition nécessaire à la langue : la suite de pensées.
Il affirme que les animaux n'ont aucune langue, car ils ne disposent pas de cette capacité à enchaîner des idées.
Il leur concède tout au plus des appréhensions et des sensations rudimentaires, qui ne suffisent pas à produire la réflexion, qui est l'essence de la pensée.
Il s'appuie sur une définition de la pensée comme association d'idées, qui renvoie à la philosophie empiriste anglaise (locke, hume).
- ensuite, il établit un lien entre la pensée, la parole et l'invention.
Il soutient que les animaux ne pensent ni ne parlent, parce qu'ils ne peuvent joindre ensemble aucune idée.
Il en déduit qu'ils sont incapables d'innover et de perfectionner leurs activités, qu'elles soient techniques (comme le barrage du castor) ou artistiques (comme la cellule de l'abeille).
Il s'appuie sur une observation empirique des comportements animaux, qui restent constants et uniformes au cours du temps.
- enfin, il oppose l'intelligence humaine à celle des animaux.
Il affirme que si on suppose que l'abeille a atteint le dernier point de perfection dans son ouvrage, on lui attribue une intelligence supérieure à la nôtre, qui serait capable de saisir d'un coup le but ultime de son art.
Il montre que cette hypothèse est absurde, car nous-mêmes ne connaissons pas ce point, et que nous devons recourir à la réflexion, au temps et à l'habitude pour améliorer nos arts.
Il s'appuie sur une conception de l'intelligence comme faculté de progresser par essais et erreurs, qui renvoie à la philosophie des lumières (condillac, diderot).