• Hume
La diversité des goûts et des opinions
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Le contexte :

Ce texte de hume souligne la grande variété de goûts et d'opinions qui existe dans le monde. il met en évidence la différence de perception du beau et du laid, même au sein d'une même langue, et souligne la complexité de parvenir à  un consensus sur ce qui est considéré comme bon ou mauvais.

L' auteur :

Hume

(1711 - 1776) David Hume, philosophe écossais du XVIIIe siècle, remet en question les fondements de la connaissance humaine. Il soutient que toute notre compréhension repose sur l'expérience sensorielle et nie l'existence de concepts innés. Son œuvre majeure explore la nature de la croyance, de la causalité et de la moralité.

Le repère :

objectif/subjectif/intersubjectif

Le texte :

« La grande variété de goût autant que d'opinion qui prévaut dans le monde est une chose trop manifeste pour avoir échappé à l'observation générale. Il ne faut pas de grandes lumières pour remarquer autour de soi, dans le cercle étroit de ses connaissances, des différences de goût, fût-ce entre des personnes qui ont été éduquées sous le même gouvernement et qui se sont tôt pénétrées des mêmes préjugés. Mais celui qui sait élargir sa vue jusqu'à embrasser les nations lointaines et les époques reculées, est plus surpris encore : ce n'est partout que diversité et contrariété. Nous sommes très prompts à dire barbare tout ce qui s'éloigne de notre goût et de notre perception ; mais nous sommes vite payés en retour du même qualificatif infamant. Et il n'est d'arrogance ou de suffisance qui ne s'alarme à la fin, trouvant de tous côtés une égale assurance, et qui n'hésite, dans une dispute si générale, à se déclarer toujours et avec la même fermeté, en faveur de son propre sentiment. Si cette variété de goût est déjà évidente aux yeux les moins avertis, un peu de réflexion montre qu'elle est encore plus grande en réalité qu'en apparence. Il n'est pas rare que les hommes diffèrent dans leurs sentiments touchant le beau et le laid, alors même que le discours général qu'ils tiennent est identique. Il y a en chaque langue certains termes pour signifier le blâme et d'autres pour signifier l'éloge. Et tous les hommes qui emploient la même langue doivent s'accorder sur la manière de les appliquer. Toutes les voix s'unissent pour applaudir en matière de style l'élégance, la convenance, la simplicité, le bel esprit, et pour blâmer l'emphase, l'affectation, la froideur, le faux brillant. Mais lorsque nos critiques descendent dans le détail, cette belle unanimité disparaît et l'on découvre qu'ils avaient attaché à leurs expressions des sens très différents. »
Hume, De la Règle du goût (1757)

L'analyse :

Voici un possible développement de l'analyse du texte : dans ce texte, hume s'intéresse à la question du go¹t, c'est-à-dire de la faculté de juger du beau et du laid dans les arts et dans la nature.

Il cherche à montrer que le go¹t est une notion relative et subjective, qui varie selon les individus, les cultures et les époques.

Il procède par trois étapes :

- dans le premier paragraphe, il expose le fait de la diversité des go¹ts, qu'il présente comme une "chose trop manifeste pour avoir échappé à l'observation générale".

Il s'appuie sur l'expérience commune de chacun, qui peut constater autour de soi des différences de go¹t, même entre des personnes qui partagent le même contexte social et culturel.

Il renforce son propos en élargissant la perspective aux "nations lointaines et aux époques reculées", où il constate une "diversité et une contrariété" encore plus frappantes.

Il souligne ainsi l'absence d'un critère universel et objectif du go¹t, qui conduirait à un accord général sur le beau et le laid.

Il critique l'attitude ethnocentrique qui consiste à traiter de "barbare" tout ce qui s'écarte de son propre go¹t, en montrant qu'elle se heurte à une réciproque méprisante.

Il conclut que face à cette "dispute si générale", il est difficile de maintenir avec assurance son propre sentiment.



- dans le deuxième paragraphe, il approfondit sa réflexion en montrant que la diversité des go¹ts est encore plus grande qu'il n'y paraît.

Il explique que les hommes peuvent diverger dans leurs jugements esthétiques, même lorsqu'ils emploient les mêmes termes pour exprimer leur blâme ou leur éloge.

Il prend l'exemple du style littéraire, où il existe des mots communs pour désigner les qualités et les défauts d'une £uvre, tels que l'élégance, la convenance, la simplicité, le bel esprit, l'emphase, l'affectation, la froideur, le faux brillant.

Il affirme que tous les hommes qui parlent la même langue doivent s'accorder sur l'usage de ces termes, ce qui semble impliquer une certaine norme du go¹t.

Mais il révèle que cette apparente unanimité cache en réalité des sens très différents attachés à ces expressions.

Il suggère ainsi que le langage est insuffisant pour rendre compte de la finesse et de la nuance des sentiments esthétiques, qui relèvent davantage de l'impression personnelle que du raisonnement.



- dans le troisième paragraphe (non reproduit ici), il examine les causes de cette diversité des go¹ts, qu'il attribue à des facteurs physiques (la constitution du corps et des organes), moraux (le caractère et les passions) ou culturels (l'éducation et les préjugés).

Il reconnaît que ces causes sont difficiles à déterminer avec précision, et qu'elles peuvent varier selon les circonstances.

Il admet donc que le go¹t est une faculté incertaine et fluctuante, qui ne peut prétendre à une vérité absolue.

Il propose néanmoins de distinguer entre un go¹t naturel et un go¹t artificiel, le premier étant fondé sur un sentiment immédiat et universel, le second sur un jugement réfléchi et particulier.

Il suggère ainsi qu'il existe un moyen de corriger et d'améliorer son go¹t, en se fondant sur des principes généraux tirés de l'expérience humaine.

L'enjeu de ce texte est donc de remettre en question l'idée d'un go¹t universel et objectif, qui serait fondé sur la raison ou sur une essence du beau.

Hume adopte une approche empiriste et relativiste, qui consiste à observer les faits de la diversité des go¹ts et à en rechercher les causes dans la nature humaine.

Il n'envisage pas le go¹t comme une règle fixe et intangible, mais comme une faculté sensible et variable, qui dépend des impressions individuelles et des circonstances historiques.

Il ouvre ainsi la.