• Augustin
La vérité et le mensonge : une question de croyance et d'intention
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Le contexte :

Dans cet extrait de l'ouvrage "du mensonge" d'augustin, l'auteur explore la complexité de la notion de mensonge. selon lui, mentir ne se résume pas seulement à  énoncer une chose fausse, mais dépend également de la croyance et de l'intention de celui qui parle. il soulàùve ainsi la question de la vérité et de la tromperie.

L' auteur :

Augustin

(354-430) Philosophe et théologien chrétien de l'Antiquité tardive, Saint Augustin a formulé des idées pour le christianisme occidental, notamment sur la grâce divine, le péché, la prédestination, et la relation entre la foi et la raison. Son œuvre "Les Confessions" est une exploration autobiographique de sa conversion au christianisme et de son cheminement spirituel.

Le repère :

croire/savoir

Le texte :

« Quiconque énonce une chose qu'il croit ou s'imagine être vraie, bien qu'elle soit fausse, ne ment pas. En effet, il a une telle confiance dans son énoncé qu'il ne veut exprimer que ce qu'il a dans l'esprit, et qu'il exprime en effet. Mais bien qu'il ne mente pas, il n'est cependant pas irréprochable, s'il croit ce qu'il ne faut pas croire, ou s'il pense savoir une chose qu'il ignore, quand même elle est vraie, car il tient pour connue une chose inconnue. Ainsi donc mentir, c'est avoir une chose dans l'esprit, et en énoncer une autre soit en paroles, soit en signes quelconques. C'est pourquoi, on dit du menteur qu'il a le cūur double, c'est-à-dire une double pensée : la pensée de la chose qu'il sait vraie et qu'il n'exprime point, et celle de la chose qu'il lui substitue, bien qu'il la sache ou la croie fausse. D'où il résulte qu'on peut, sans mentir, dire une chose fausse, quand on la croit telle qu'on la dit, bien qu'elle ne soit pas telle réellement, et qu'on peut mentir en disant la vérité, quand on croit qu'une chose est fausse, et qu'on l'énonce comme vraie, quoiqu'elle soit réellement telle qu'on l'énonce, car c'est d'après la disposition de l'âme, et non d'après la vérité ou la fausseté des choses mêmes qu'on doit juger que l'homme ment ou ne ment pas. On peut donc dire que celui qui énonce une chose fausse comme vraie, mais qui la croit vraie, se trompe ou est imprudent, mais on ne peut !'appeler menteur, parce qu'il n'a pas le cūur double quand il parle, qu'il n'a pas l'intention de tromper, mais que seulement il se trompe. »
Augustin, Du Mensonge (début du Ve siècle)

Les questions :



[A] - Questions d'analyse
1. Comment Augustin définit-il le mensonge ?
2. Qu'est-ce que cela signifie quand Augustin dit que "mentir, c'est avoir une chose dans l'esprit, et en énoncer une autre soit en paroles, soit en signes quelconques" ?
3. Pourquoi Augustin dit-il que celui qui énonce une chose fausse comme vraie, mais qui la croit vraie, ne peut pas être appelé menteur ?
4. Quelle est la différence entre se tromper et mentir selon Augustin ?

[B] - Éléments de synth��se
1. Expliquez la phrase "on dit du menteur qu'il a le c�oeur double".
2. Quelle est l'idée principale du texte et quelles sont les étapes de son argumentation ?

[C] - Commentaire
1. Pensez-vous que la définition d'Augustin du mensonge soit toujours valable aujourd'hui ? Justifiez votre réponse.
2. À la lumi��re de vos connaissances et de vos lectures, et en tenant compte du texte, vous vous demanderez si la vérité est toujours préférable au mensonge.

L'analyse :

Voici un possible développement de l'analyse du texte : dans ce texte, augustin s'interroge sur la nature et les conditions du mensonge.

Il commence par distinguer le mensonge de l'erreur, en affirmant que celui qui dit une chose fausse, mais qu'il croit vraie, ne ment pas.

Il explique cela par le fait que le menteur a une double pensée, c'est-à-dire qu'il sait la vérité, mais qu'il choisit de la dissimuler et de dire le contraire.

Il en déduit que le critère du mensonge n'est pas la conformité ou la non-conformité de l'énoncé avec la réalité, mais l'intention de tromper qui anime le locuteur.

Il illustre ce point en montrant qu'on peut mentir en disant la vérité, si on croit qu'elle est fausse et qu'on veut induire en erreur son interlocuteur.

Il conclut que le jugement sur le mensonge doit se faire d'après la disposition de l'âme, et non d'après la véracité des choses.

Augustin adopte une démarche argumentative, qui consiste à poser une thèse, à la justifier par des raisons, à la nuancer par des exemples, et à la résumer par une définition.

Il utilise des connecteurs logiques pour marquer les étapes de son raisonnement, comme "en effet", "ainsi donc", "d'où il résulte", "on peut donc dire".

Il emploie des termes précis pour définir les concepts qu'il mobilise, comme "mentir", "croire", "savoir", "exprimer", "penser".

Il recourt à des oppositions pour mettre en évidence les différences entre les situations qu'il examine, comme "vrai/faux", "dire/cacher", "tromper/se tromper".

Augustin a pour enjeu de clarifier la notion de mensonge, qui relève de l'éthique et de la communication.

Il veut montrer que le mensonge n'est pas une simple erreur ou ignorance, mais un acte volontaire et malhonnête, qui implique une contradiction entre ce que l'on pense et ce que l'on dit.

Il veut aussi souligner que le mensonge ne dépend pas seulement du contenu de l'énoncé, mais aussi de l'attitude du locuteur, qui peut être sincère ou hypocrite.

Il veut enfin proposer un critère pour distinguer le mensonge de la vérité, qui repose sur la disposition de l'âme, c'est-à-dire sur l'état moral et psychologique de celui qui parle.