Le texte :
« Celui qui est puni ne mérite pas la punition : on ne se sert de lui que comme d’un moyen d’intimidation pour empêcher à l’avenir certains actes ; celui que l’on récompense ne mérite pas davantage sa récompense : il ne pouvait en effet agir autrement qu’il n’a agi. Ainsi la récompense n’a d’autre sens que d’être un encouragement pour lui et pour les autres, elle a donc pour fin de fournir un motif à de futures actions ; on acclame celui qui est en train de courir sur la piste, non pas celui qui est au but. Ni la peine ni la récompense ne sont choses qui reviennent à l’individu comme lui appartenant en propre ; elles lui sont données pour des raisons d’utilité, sans qu’il ait à y prétendre avec justice. Il faut dire �oele sage ne récompense pas parce qu’on a bien agi” de la même manière que l’on a dit �oele sage ne punit pas parce qu’on a mal agi, mais pour empêcher que l’on agisse mal”. Si peine et récompense disparaissaient, du même coup disparaîtraient les motifs les plus puissants qui détournent de certaines actions et poussent à certaines autres ; l’intérêt de l’humanité en exige la perpetuation . »
Nietzsche, Humain, trop humain (1878)