• Alain
La prédestination comme illusion
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Le contexte :

Dans ce texte, alain remet en question la notion de prédestination et souligne l'importance de comprendre la liaison entre les choses et les causes et effets. il explique que la connaissance de l'avenir peut justement empêcher sa réalisation, et que notre capacité à  prévoir et à  agir nous permet d'échapper aux malheurs. ainsi, il remet en cause l'idée d'un avenir inévitable et souligne le ràïle de notre libre arbitre dans la construction de notre destinée.

L' auteur :

Alain

(1868-1951) Il effectue un mouvement de retour au Cartésianisme en niant l'inconscient Freudien, selon lui ce dernier doit être réduit aux pulsions du corps opposées à la rationalité de l'Esprit.

Le repère :

contingent/nécessaire

Le texte :

« Tant que l’on n’a pas bien compris la liaison de toutes choses et l’enchaînement des causes et des effets, on est accablé par l’avenir. Un rêve ou la parole d’un sorcier tuent nos espérances le présage est dans toutes les avenues. Idée théologique. Chacun connaît la fable de ce poète à qui il avait été prédit qu’il mourrait de la chute d’une maison ; il se mit à la belle étoile ; mais les dieux n’en voulurent point démordre, et un aigle laissa tomber une tortue sur sa tête chauve, la prenant pour une pierre. On conte aussi l’histoire d’un fils de roi qui, selon l’oracle, devait périr par un lion ; on le garda au logis avec les femmes ; mais il se fâcha contre une tapisserie qui représentait un lion, s’écorcha le poing sur un mauvais clou, et mourut de gangrène. L’idée qui sort de ces contes, c’est la prédestination, que des théologiens mirent plus tard en doctrine ; et cela s’exprime ainsi : la destinée de chacun est fixée quoi qu’il fasse. Ce qui n’est point scientifique du tout ; car ce fatalisme revient à dire : �oeQuelles que soient les causes, le même effet en résultera.” Or, nous savons que si la cause est autre, l’effet sera autre. Et nous détruisons ce fantôme d’un avenir inévitable par le raisonnement suivant ; supposons que je connaisse que je serai écrasé par tel mur tel jour à telle heure ; cette connaissance fera justement manquer la prédiction. C’est ainsi que nous vivons ; à chaque instant nous échappons à un malheur parce que nous le prévoyons ; ainsi ce que nous prévoyons, et très raisonnablement, n’arrive pas. Cette automobile m’écrasera si je reste au milieu de la route ; mais je n’y reste pas. »
Alain, Propos, propos du 28 août 1911

Les questions :



[A] - Questions d'analyse
1) Quel est le lien entre la compréhension de la liaison des choses et l'appréhension de l'avenir ?
2) Comment l'auteur utilise-t-il des exemples pour illustrer son propos ?
3) Quelle est l'idée principale qui émerge de ces exemples ?
4) Comment l'auteur remet en question l'idée de prédestination ?

[B] - Éléments de synth��se

L'analyse :

Voici un exemple de commentaire linéaire du texte : le texte d'alain est un extrait d'un de ses propos, des articles philosophiques qu'il publiait régulièrement dans la presse.

Il s'agit d'un texte argumentatif qui vise à réfuter l'idée de la prédestination, c'est-à-dire la croyance selon laquelle l'avenir de chacun est fixé à l'avance par une volonté divine ou un destin inéluctable.

Alain veut montrer que cette idée n'est pas scientifique et qu'elle empêche de comprendre la liaison des causes et des effets.

Il procède en trois étapes :

- dans le premier paragraphe, il expose le point de vue qu'il critique, celui des gens qui sont "accablés par l'avenir" et qui croient aux présages, aux rêves ou aux oracles.

Il utilise le terme "idée théologique" pour désigner cette croyance, qui relève selon lui de la religion et non de la raison.

Il illustre son propos par deux exemples tirés de la mythologie ou de la littérature, qui montrent l'absurdité et l'ironie du sort qui frappe ceux qui tentent d'échapper à leur destinée annoncée.

Il s'agit de la fable d'eschyle, le poète tué par une tortue, et de l'histoire du fils de roi qui meurt d'une blessure causée par une tapisserie représentant un lion.

Ces exemples ont pour fonction de ridiculiser le point de vue adverse et de susciter le rire du lecteur.



- dans le deuxième paragraphe, il formule le principe général qui sous-tend l'idée de la prédestination : "la destinée de chacun est fixée quoi qu'il fasse".

Il réfute ensuite ce principe en affirmant qu'il n'est "point scientifique du tout".

Il oppose en effet le fatalisme, qui nie le rôle des causes, à la science, qui cherche à établir les lois qui régissent les phénomènes.

Il utilise une formule lapidaire pour exprimer cette opposition : "or, nous savons que si la cause est autre, l'effet sera autre".

Il s'appuie ainsi sur le savoir commun et sur l'expérience pour invalider le point de vue qu'il critique.



- dans le troisième paragraphe, il propose un raisonnement par l'absurde pour démontrer que l'idée de la prédestination est contradictoire.

Il imagine qu'il connaisse à l'avance le moment et le lieu de sa mort, et il montre que cette connaissance même lui permettrait d'éviter le malheur annoncé.

Il conclut que "ce que nous prévoyons, et très raisonnablement, n'arrive pas".

Il oppose ainsi la prévision, qui relève de la raison et du calcul des probabilités, à la prédiction, qui relève de la superstition et du hasard.

Il illustre son propos par un exemple concret et quotidien : celui d'un piéton qui évite une automobile en se déplaçant sur le trottoir.

Il suggère ainsi que nous sommes maîtres.