Introduction
Dans la Critique de la faculté de juger, publiée en 1790, Emmanuel Kant aborde un domaine de la philosophie qui n'avait pas encore été traité de manière systématique : l'esthétique. Il s'intéresse à la manière dont nous jugeons du beau, du sublime, et de la finalité de la nature.
Les jugements déterminants et réfléchissants
Kant distingue deux types de jugements : les jugements déterminants et les jugements réfléchissants. Les jugements déterminants sont ceux que nous portons sur des objets que nous connaissons déjà. Ils sont fondés sur des concepts, qui nous permettent de subsumer l'objet sous une catégorie de l'entendement. Par exemple, lorsque nous jugeons qu'un objet est rond, nous le subsumons sous la catégorie de la quantité.
Les jugements réfléchissants, en revanche, sont ceux que nous portons sur des objets que nous ne connaissons pas encore. Ils sont fondés sur des principes de finalité, qui nous permettent de nous représenter l'objet comme s'il avait été conçu pour répondre à un but. Par exemple, lorsque nous jugeons qu'une fleur est belle, nous la concevons comme s'elle avait été créée pour plaire à la vue.
Le jugement esthétique
Le jugement esthétique est un type de jugement réfléchissant. Il porte sur le sentiment de plaisir ou de déplaisir que nous éprouvons face à un objet. Kant affirme que le jugement esthétique est contemplatif et désintéressé.
Contemplatif signifie que le jugement esthétique ne vise pas à connaître l'objet, mais simplement à le contempler. Il ne s'agit pas de déterminer si l'objet est utile ou non, mais simplement de le trouver agréable ou désagréable.
Désintéressé signifie que le jugement esthétique n'est pas motivé par un intérêt personnel. Nous jugeons une fleur belle non pas parce qu'elle nous plaît, mais parce qu'elle nous semble belle en elle-même.
La distinction entre le beau et l'agréable
Kant distingue le beau de l'agréable. L'agréable est ce qui procure du plaisir, sans qu'il y ait une raison particulière. Le beau, en revanche, est ce qui procure du plaisir de manière universelle et désintéressée.
L'universalité du jugement esthétique
Kant affirme que le jugement esthétique est universel. Cela signifie qu'il est valide pour tous les sujets qui jugent de l'objet de manière désintéressée.
Kant explique l'universalité du jugement esthétique par le bon sens. Le bon sens est la capacité de saisir l'accord entre l'image de l'objet et nos besoins d'unité et de finalité. Lorsque nous jugeons une fleur belle, nous saisissons l'accord entre sa forme, ses couleurs, et nos besoins d'harmonie.
Le sublime
Le sublime est un sentiment de grandeur et de puissance qui nous saisit face à un objet. Il se distingue du beau en ce qu'il ne procure pas du plaisir, mais de la terreur ou de l'admiration.
Kant distingue deux types de sublime : le sublime mathématique et le sublime dynamique.
Le sublime mathématique est le sentiment de grandeur que nous éprouvons face à un objet qui est si grand qu'il nous dépasse. Par exemple, nous pouvons ressentir du sublime mathématique face à l'immensité de l'océan ou de la montagne.
Le sublime dynamique est le sentiment de puissance que nous éprouvons face à un objet qui est si puissant qu'il nous menace. Par exemple, nous pouvons ressentir du sublime dynamique face à la puissance de la tempête ou d'un volcan.
Le jugement téléologique
Le jugement téléologique est un jugement réfléchissant qui porte sur la finalité de la nature. Il s'agit de juger qu'un objet est organisé de manière à servir un but.
Kant affirme que le jugement téléologique est fondé sur un besoin irrépressible du sujet. Nous avons besoin de supposer que la nature est organisée de manière à servir un but, afin de nous sentir à notre place dans l'univers.